Le 11 août 117, Hadrien succédait à Trajan comme empereur de Rome. Mille neuf cents ans plus tard, le musée archéologique d’Athènes accueille l’exposition « Hadrien et Athènes, dialogue avec un monde idéal », un somptueux hommage à ce César qui aima passionnément la Grèce.
Buste en marbre de l’empereur Hadrien, découvert à Athènes en 1932, vers 130-140 ap. J.-C. © Musée archéologique d’Athènes
Dix ans plus tôt que la plupart des plébéiens ayant accédé à cette fonction, Hadrien (76-138) est nommé consul en 108. Celui à qui les oracles avaient à plusieurs reprises prédit un destin impérial, compose alors les discours de l’empereur Trajan. On connaît peu de choses de ses voyages (sa biographie officielle ayant disparu) jusqu’en 112, date de son arrivée à Athènes. Là, avec sa formation intellectuelle romaine, cet homme raffiné se sent très vite chez lui et tombe sous le charme des lettres et de la philosophie grecques. Les Grecs le lui rendent bien puisqu’il reçoit la citoyenneté athénienne et devient archonte du village de Besa. On lui érige même une statue à son effigie à proximité du théâtre de Dionysos, laquelle est agrémentée d’une inscription en latin et en grec. Quand il devient empereur de Rome, Hadrien est un voyageur et un bâtisseur d’Empire, avec de la poigne et de la rigueur. De la Grande-Bretagne aux confins de la Syrie, et bien sûr dans tout le Bassin méditerranéen, il développe l’intégration des provinces à l’Empire en appliquant le statut de municipe romain aux cités incorporées, permettant ainsi aux habitants d’obtenir la citoyenneté romaine complète. Personnalité flamboyante, admiré par les uns et méprisé par les autres, Hadrien vouait un véritable culte à la beauté et nourrissait une passion frénétique pour l’architecture. On lui connaît également une obsession folle de l’astrologie qui répondait à sa quête désespérée pour prolonger son existence.
Amoureux des Arts et des Lettres, ce César grec, surnommée graeculus (« le petit Grec ») dans le monde romain, s’efforça de restaurer la religion grecque comme il renforça l’étude de la philosophie et de la poésie helléniques. Hadrien offrit également une véritable Renaissance à Athènes avec la construction de l’Olympéion, d’une villa d’Hadrien avec son Arc, ses nouveaux portiques de l’Agora romaine et une bibliothèque de renom. De nos jours encore, sur la place Monastiraki (qui accueille aujourd’hui le marché aux puces de la ville), il reste quelques hautes colonnes corinthiennes, vestiges de la bibliothèque d’Hadrien construite en 132 et qui comprenait cent colonnes en marbre ! Il crée aussi le Panthellénion, cette assemblée de paix qui réunit les cités d’autrefois et qui siège à Athènes. Partout où il passe, l’empereur restaure le monde hellénique d’autrefois. En Égypte, sur la rive gauche du Nil, par exemple, il rend un culte à la statue chantante de Memnon, qui porte des poèmes le célébrant ainsi que l’impératrice Sabine. Hadrien restaure évidemment la bibliothèque d’Alexandrie et fonde, dans la douleur, la cité d’Antinoupolis, lieu de la mort tragique de son amant Antinoüs qui s’est noyé dans le Nil. Rappelons aussi qu’en l’an 124, l’empereur Hadrien, qui se délectait de musique sacrée, se convertit aux mystères d’Eleusis.
Portrait en buste d’Antinoüs, découvert à Patras, vers 130-138 ap. J.-C., devant une stèle présentant la liste des responsables du Gymnasium et des éphèbes © Musée archéologique d’Athènes
L’exposition du musée archéologique d’Athènes, élaborée sous la houlette du professeur Kostas Nikolentzos, chef du département des antiquités préhistoriques, égyptiennes, chypriotes et orientales de l’institution, est un modèle du genre. D’une grande simplicité d’exécution, elle se nourrit d’une extraordinaire richesse intellectuelle. Les quatre premières salles, vastes et hautes sous plafond, révèlent pas moins de cent trente-huit sculptures en marbre et deux bronzes monumentaux. L’Antiquité romaine y est illustrée depuis le règne de Trajan (98-117) jusqu’à celui de l’empereur Commode (180-192), et au-delà. Le titre de l’exposition, « Dialogue avec un monde idéal », mérite bien son nom. Le chignon de Julia Aquilia Severa, chef-d’œuvre en bronze découvert à Sparte, fait face à une figure de jeune homme en marbre, peut-être Hermès, vêtu d’une chlamyde et qui se distingue par l’élégance de sa facture. Un peu plus loin, de nombreuses têtes en marbre de l’empereur Trajan opposent leur puissance hors nature à la douceur d’une Ménade endormie, une sculpture découverte sur la face sud de l’Acropole. Chaque œuvre est sélectionnée avec goût et l’on peut aussi bien se délecter jusqu’à l’ivresse de la beauté du corps d’un athlète de Délos que de la magie du regard d’une princesse sparte.
Après ce dédale envoûtant de marbres qui rivalisent de beauté, la dernière salle nous fait basculer dans l’intimité d’Hadrien. L’empereur apparaît au centre de la pièce, sa tête en marbre de Thasos, découverte dans l’Agora d’Athènes, est légèrement tournée vers la gauche. Derrière lui, vingt-cinq têtes de dignitaires en marbre, comme autant de guetteurs de l’au-delà, semblent vouées à leur César pour l’éternité, grâce à l’éclairage d’une scénographie prodigieuse. Une autre tête colossale d’Hadrien, en marbre pentelique cette fois, dotée d’une couronne de feuilles de chêne et d’un médaillon abritant un aigle, paraît défier les autres patriciens qui l’entourent. Elle pose également son regard protecteur sur un Aristote double-tête, copie romaine d’une qualité extrême, trois stèles d’une grande rareté illustrant notamment les concours navals entre éphèbes, ou encore la figure sereine d’Herodes Atticus (101-178), orateur athénien, sophiste et philosophe, bienfaiteur d’Athènes et professeur d’Hadrien. Les yeux tournés vers la gauche, l’empereur Hadrien observe l’immense buste d’Antinoüs, chef-d’œuvre en marbre provenant de Patras, comme pour mieux transcender la mort tragique de son amant.
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