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Comme partout dans le monde, les jeunes au Maroc sont au coeur de la vague des cryptomonnaies. Pour certains, c’est l’avenir, mais pour d’autres, ce n’est qu’une simple phase dont il faut tirer profit un maximum. Mais ils sont presque unanimes: le Royaume doit prendre la voie de la légalisation.
“C’est devenu presque toute ma vie …ou du moins pour les 2 ou 3 prochaines années en principe”. Soufiane, 26 ans, est scotché devant son ordinateur portable, les yeux bien fixés sur son écran surchargé de chiffres et de graphiques. Le jeune enseignant de langue anglaise dans un lycée de Casablanca suit de très près l’évolution des valeurs des cryptomonnaies dans lesquelles il investit depuis à peu près un an et demi. Un rituel quotidien de quatre heures en moyenne, voire plus durant les week-ends, pour ce jeune Marocain, qui possède actuellement l’équivalent de 70.000 dirhams en différentes monnaies numériques.
“Un ami à l’étranger m’a introduit dans cet univers et m’a convaincu que je pouvais me faire de l’argent, alors j’ai foncé”, raconte Soufiane. En l’espace de 15 mois, il a réussi à faire fructifier son investissement initial de 100 dollars américains (environ 1.000 dirhams). Mais pour lui, les cryptomonnaies ne sont qu’une mode passagère, qu’il faut bien exploiter avant de se retirer. Par contre, la technologie du blockchain, sur laquelle repose cet univers, sera toujours d’actualité, d’après Soufiane.
Plateforme de recherche
Des Marocains comme lui, investissant dans la crypto, il y en avait à peu près 900.000 en 2021, soit 2,4% de la population du Royaume, selon un rapport publié en janvier 2022 par Triple A, une plateforme de recherche en cryptomonnaies et de paiements cryptographiques. Bien qu’aucune statistique n’existe pour l’instant concernant le Maroc, on peut supposer que ce milieu est dominé par les jeunes. En France, 32% des 18 à 24 ans ont déjà réalisé des investissements ou souhaiteraient investir dans des cryptomonnaies. La moyenne nationale sur l’ensemble des Français est nettement plus basse, 17%. Ce constat est dupliqué dans plusieurs pays à travers le globe. Et les indicateurs dans le Royaume devraient continuer à augmenter, alors que l’engouement pour les monnaies virtuelles ne semble être qu’à ses débuts dans le pays.
“Ça fait un moment que les cours sont dans le rouge. C’est le moment parfait pour se lancer dedans ou même pour mettre encore plus d’argent”, nous confie Karim, avec sérénité et certitude. Pourtant, cet ingénieur en informatique de 37 ans vient de perdre pas moins de 120.000 dirhams, en l’espace de quelques semaines. Depuis plusieurs semaines, quasiment toutes les cryptomonnaies suivent une tendance baissière continue. Notamment le Bitcoin, la plus chère et la plus célèbre de toutes les cryptomonnaies, au point d’en devenir un peu l’emblème, qui a chuté de son plus haut historique de 68.000 dollars en novembre 2021, à 32.300 dollars début février 2022, soit une baisse de plus de 50%. Si cela peut paraître inquiétant avec un regard extérieur ou même pour certains novices, nombreux sont ceux qui préfèrent suivre la règle d’or du “I’m holding”, littéralement “je garde” en anglais. Une sorte de “commandement” qui consiste, pour faire simple, à ne pas céder à la panique provoquée par la baisse des cours, et par conséquent ne pas vendre ses cryptomonnaies.

“Quand tu assimiles bien les techniques et les astuces de cet univers, tu comprends qu’il ne faut jamais se précipiter”, analyse Karim, qui nous affirme qu’il fait désormais des cryptomonnaies sa principale activité professionnelle. Ce dernier passe par des plateformes p2p (peer to peer) en ligne, comme localbitcoins. com pour acheter encore plus et étoffer son portefeuille, profitant de l’intraçabilité offerte par ces canaux. Mais pas question de vendre pour empocher de l’argent ou contre des biens pour le moment. Au Maroc, le volume d’échanges p2p a atteint les 6 millions de dollars en 2021, ce qui classe le Royaume à la 4ème place en Afrique, derrière l’Afrique du Sud, le Nigéria et le Kenya, et la 24ème au niveau mondial. Certains analystes pensent même que le volume réel du p2p au Maroc est au moins trois fois plus important. “Ceux qui ne lisent pas assez cherchent souvent le profit facile et rapide à court terme, et ça se termine mal pour eux car ce sont des cibles faciles pour les autres traders en ligne”, martèle notre interlocuteur.
Approche “archaïque”
Car il faut bien le savoir, la cryptomonnaie ne fait pas que des heureux. Comme tout investissement, il faut s’attendre à tout, et le gain n’est pas assuré pour tout le monde. C’est le cas de Abdelghafour, 27 ans. Comme beaucoup d’autres jeunes hyper connectés, cet étudiant en école de commerce féru de jeux vidéo s’initie un peu sur les monnaies digitales en ligne, notamment sur le très célèbre site Reddit. Très peu emballé dans un premier temps, il finit par faire le premier pas, mais d’une façon assez particulière: des jeux en ligne.
“Un ami m’en a parlé, et j’ai choisi Cryptomines, un jeu ou tu peux gagner des récompenses sous forme de cryptomonnaies. Mais pour y participer, il faut investir pour construire des items virtuels”, nous explique Abdelghafour. Sous l’emprise du désir de gagner de l’argent le plus rapidement possible, mais aussi du caractère trop attachant du jeu, le jeune homme finira par perdre 24.000 dirhams en deux mois. Le jeu en question a en effet mis les clés sous la porte, et sa propre monnaie virtuelle a perdu toute sa valeur. Malgré ce revers, notre interlocuteur continue d’y croire, tout en s’abstenant de tout nouvel investissement pour le moment. “Il y a d’autres jeux qui marchent et qui sont plus fiables. Mon erreur était de lancer dedans au mauvais moment, et sans préparation”, conclut-il.
Toute cette dynamique se poursuit alors que pour l’instant, les monnaies virtuelles sont formellement interdites au Maroc depuis 2017. L’Office des changes avait alors affirmé que ces transactions constituent “une infraction à la réglementation des changes”. Une situation “aberrante” pour les adeptes du Bitcoin et cie, qui dénoncent l’approche “archaïque” de l’État marocain vis-à-vis de la question. “De toute façon, les autorités ne peuvent rien contre nous car tout est anonyme. Et puis au lieu d’interdire, il faut saisir l’occasion avant qu’on soit largués”, avance Anas, 31 ans. Derrière son regard froid, se cache un geek extrêmement passionné. Blockchain, p2p, BTFP, Bull Market .. ce diplômé en marketing et chef d’une petite entreprise connait le jargon sur le bout des doigts. “C’est une activité secondaire pour moi, mais j’y trouve du plaisir. C’est comme un jeu mais avec des enjeux importants», poursuit-il.
Anas lui fait partie des “gagnants”, puisqu’il a réussi à dégager des gains de pas moins de 300.000 dirhams, après avoir investi moins de 5% de cette somme la première fois. Pour lui, c’est une aubaine, un tournant historique que le Maroc doit prendre intelligemment. Les premiers signes d’un revirement dans les positions des autorités sont déjà là. Répondant à une question d’une députée, la ministre de l’Économie et des finances, Nadia Fattah Alaoui, a révélé, lors de son passage au parlement le lundi 10 janvier 2022, que le Maroc étudie la possibilité d’instaurer un cadre juridique pour réglementer l’utilisation de la cryptomonnaie.
Il faudra donc attendre la déclinaison de ce semblant de nouvelle vision, pour pouvoir évaluer les bénéfices que le Royaume pourra tirer de la légalisation des cryptomonnaies, et les risques auxquels il pourrait s’exposer. Si certains pays, notamment en Asie de l’Est, ont ouvert leurs portes à cette technologie, d’autres affichent sont toujours réticents, craignant que l’anonymat et la décentralisation de ces monnaies profitent aux réseaux et organisations agissant hors la loi dans plusieurs domaines.

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