C’est une histoire qui commence comme un roman d’aventures mais qui finit devant les tribunaux. L’histoire d’une pêche aux oursins qui devient une chasse au trésor. L’histoire, enfin, de trois jeunes Corses pris par la fièvre de l’or avant de devoir rendre des comptes à la justice. Parmi eux, Félix Biancamaria et son copain Marc, partis chercher des oursins dans le golfe de Lava, près du cabanon familial des Biancamaria à une heure environ d’Ajaccio, un matin de septembre 1985.
Cette partie de pêche va changer leur vie. Au milieu des oursins, Marc tombe sur une pièce, visiblement très ancienne et visiblement en or. Ce jour-là, deux autres suivront. Le début d’un impressionnant filon. Félix Biancamaria finit par monter à Paris, chez un numismate, pour en faire expertiser quelques unes. Selon le récit du chanceux pêcheur, l’expert lui aurait conseillé de dire que ces pièces venaient d’un héritage et de ne surtout pas expliquer qu’il les avait trouvées dans l’eau.
Un conseil qui alerte – un peu – Biancamaria sur la légalité de cette transaction. « Quand le numismate m’a dit qu’il fallait dire que c’était un héritage, je me suis posé des questions… », racontera-t-il des années plus tard. Toujours est-il qu’à l’époque il ressort de la boutique avec un demi-million de francs en liquide, l’équivalent aujourd’hui de 100 000 euros environ.
En tout cas, son pressentiment se confirme : ces pièces sont effectivement rares et précieuses. Ce sont des auréi datant du IIIe siècle à l’effigie de différents empereurs romains Claude II le Gothique, Gallien, Aurélien… Pour Félix et sa bande, dans laquelle figure également son frère Ange, fini les oursins, place aux pièces d’or. Pendant plusieurs mois, ils plongent et remontent au total 600 pièces. Casinos, voitures, discothèques… Les jeunes hommes flambent et mènent grand train. « Il nous arrivait de dépenser 200 000 ou 300 000 francs dans la semaine, c’était énorme », avouera Félix Biancamaria.
En mer, le trésor appartient à l’Etat
Mais l’affaire s’ébruite peu à peu, d’autres plongeurs s’intéressent au filon, et la justice s’en mêle, en 1986, après qu’un certain nombre de pièces se retrouvent dans une vente aux enchères à Monaco. C’est le début des ennuis pour Félix. Car la loi est claire : en France, tout trésor retrouvé en mer appartient à l’État, et il est donc interdit de vendre ainsi les pièces du golfe de Lava. En 1995, Félix Biancamaria et ses deux compères sont condamnés à 18 mois de prison avec sursis et 15000 euros d’amende pour « détournement et recel d’épave maritime ». Selon certains experts, cet or pourrait provenir du naufrage d’un bateau romain au IIIe siècle, mais aucune trace d’épave n’a été découverte à proximité. En tout, l’État n’a finalement récupéré que 83 pièces.
L’histoire du trésor de Lava ne s’arrête pas là. Celle de Félix Biancamaria non plus. En 2010, la douane l’intercepte alors qu’il revient de Bruxelles avec, dans ses bagages, l’une des pièces maîtresse du trésor : un plat en or de 25 centimètres et de près d’1 kilo. « Ce plat, je l’avais racheté puis confié à un ami. Celui-ci a trouvé un acquéreur en Belgique mais la transaction ne s’est pas faite. Je rapportais l’objet en France », se défendait Félix Biancamaria quelques années plus tard.
Dans un reportage de TF1 diffusé en 2010, il était revenu sur la découverte initiale de ce plat dans le golfe de Lava, trouvé selon lui « carrément à terre ». Une nuance de taille pour son avocat, Me Pascal Garbarini, qui estimait que c’était « la preuve que ce trésor n’était pas maritime à l’époque mais bien terrestre, sur le terrain qui appartenait aux Biancamaria, c’est à dire à Félix ».
Michel L’Hour, directeur du Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm) de l’époque, était lui au contraire ravi de la réapparition de ce plat. « Il constitue probablement le trésor le plus important au monde pour le IIIe siècle après Jésus-Christ. De pouvoir, demain, le présenter en collection publique, de le ramener avec les pièces de monnaie, c’est restituer une page d’histoire du IIIe siècle relativement méconnue ». Depuis, le nom de Lava est réapparu dans plusieurs autres affaires, alors qu’une grande partie du trésor a été éparpillée aux quatre coins du monde.
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