Par Dr Mohamed Chtatou
La société traditionnelle amazighe était à l’origine une société matriarcale, la femme, surtout la mère avait une place centrale dans la société. On allait jusqu’à parler d’un sanctuaire vivant, pour dire combien elles étaient importantes et, à tous points de vue, considérées comme égales à l’homme.
La mère détermine donc l’appartenance familiale et on retrouve encore des traces de cette société dans la langue Tamazight avec les mots : ouma ‘’frère, mon frère » et oultma« sœur, ma sœur’’ qui sont générés à partir du lexème yemma‘’mère, ma mère’’ et nullement de celui du concepteur baba ‘’père, mon père’’.
Les femmes amazighes constituent, sans nul doute, le pilier incontournable de la famille et de la communauté amazighe. Elles sont les gardiennes d’un savoir et d’un savoir-faire ancestraux, qu’elles véhiculent à travers leur langue maternelle, vecteur de valeurs et d’identité. Le mot « Tamazight » désigne à la fois la langue, le territoire et la femme : un terme et un acte hautement symboliques.
Héritières d’une longue tradition matriarcale, les femmes amazighes continuent à remplir leur rôle et à présider à l’éducation de leurs enfants, à gérer leur foyer et à préserver leur patrimoine en termes de connaissances traditionnelles(par exemple, la transmission de la langue et des savoirs, l’éducation, la médecine traditionnelle, et l’artisanat).
Centralité de la femme chez les Imazighen
La société berbère est essentiellement matriarcale et les femmes berbères sont tenues en haute estime. Les Berbères en dépit de leur islamisation progressive qui a commencé en 680,pratiquent rarement la polygamie. Chez les Amazighs, aussi, c’est les hommes qui sont voilés (Touaregs de l’Algérie, du Mali, du Niger et les Hommes Bleus du Maroc) et pas les femmes.
Il va sans le dire que la femme jouit d’une importance capitale dans la société amazighe dans toute les contrées de Tamazgha, sans exception aucune. Elle est le pilier de la société et la gardienne des traditions culturelles et des savoirs ancestraux. Sans oublier, pour autant, que les Amazighs doivent la survie et la pérennité de leur langue à la femme qui a toujours joué le rôle de courroie de transmission de leur idiome.
Pour Fatima Sadiqi, ce rôle qui a longtemps été occultécommence à être reconnu de plus en plus dans la société amazighe :
[‘’Les femmes marocaines ont joué un rôle essentiel dans la préservation de la langue et de la culture amazighe, un rôle qui n’a commencé à être pleinement apprécié que très récemment. En effet, la question complexe du point de rencontre entre « genre » et « langue et culture », et la relation entre ce point de rencontre et le statut général des femmes, est un sujet encore très peu discuté au Maroc, bien que la citoyenneté et le statut des femmes dans ce pays multilingue et multiculturel soient étroitement liés aux langues marocaines et à leur utilisation.’’]
‘’Moroccan women have played an essential role inpreserving Amazigh language and culture, a rolethat has only very recently started to be fullyappreciated. Indeed, the complex question of thepoint where ‘gender’ and ‘language and culture’meet, and the relationship between that meetingpoint and the general status of women, is still asubject very little discussed in Morocco, althoughthe citizenship and status of women in thismultilingual and multicultural country are closelytied in with the Moroccan languages and theirusage.’’
Chez le peuple amazigh l’importance de la gente féminine est codifiée dans la langue. En effet le mot tamaghart qui désigne la femme a pour contrepartie masculine le mot amghar qui veut dire chef de clan ou de tribu, d’où le lexème tamaghartveut dire chef de famille et par extension sémantique chef de la civilisation. Parmi certains groupes berbères, comme dans le cas du Rif, la femme est le pilier de la maison : arkizth n-dhaddâth/n-ukhâm. On va même plus loin pour la surnommer dhghâghâth (fourneau bas, en terre ou en métal, apparenté au brasero, utilisé pour le chauffage ou la cuisson des aliments), pour son importance pour la survie de la société et son bien-être.
Du côté de l’affiliation chez les Berbères, on retrouve la centralité de la femme. En effet la société amazighe depuis l’aube des temps était une société matriarcale. C’est seulement après l’arrivée de l’islam en Afrique du Nord à partir du VIIe siècle que progressivement la société a commencé à adopter une apparence patriarcale, bien que le matriarcat reste toujours de mise.
Toutefois, dans la langue l’affiliation a toujours un aspect matriarcal, ainsi pour le mot ‘’frère’’ ouma et oultma ‘’sœur’’ on trouve le lexème de base ma de yemma ‘’mère’’, comme cité ci-dessus. On trouve cet aspect plus apparent dans la langue touarègue aussi, d’après H. Claudot-Hawad :
‘’Chez les Touaregs, la plupart des termes sont composés à partir du lexème de base qui désigne la « mère » (ma). Ainsi, en tamahaght, le frère et la sœur sont appelées littéralement « fils ou fille de la mère » (aña, amalgame phonétique de ag ma, et welet ma) ; l’oncle maternel (parent « croisé »), distinct de l’oncle paternel (parent « parallèle »), se dénomme “fils de la mère de la mère” (añat ma) ; le “neveu” et la “nièce” d’un homme sont définis comme « fils / fille de la fille de la mère » (ag elet ma et ulet elet ma). Cette logique sémantique singulière se retrouve à l’œuvre, au moins partiellement, dans beaucoup de terminologies de parenté de l’aire berbérophone et notamment dans l’appellation des germains’’.

En outre, les Touaregs ont une ascendance matrilinéaire. La descendance matrilinéaire est également encouragée par la production de la langue.  Becker explique que la langue amazighe est celle
[« de l’identité culturelle, du foyer, de la famille, de l’affiliation au village, de l’intimité, des traditions, de l’oralité et de la nostalgie d’un passé lointain »]
“of cultural identity, home, the family, village affiliation, intimacy, traditions, orality, and nostalgia to a remote past”
et qu’en tant que telle, elle
[« perpétue des attributs considérés comme féminins dans la culture marocaine »]
“perpetuates attributes that are considered female in the Moroccan culture”  
De plus, les femmes amazighes enseignent la langue et sont donc les gardiennes et les porteuses de leurs identités culturelles et de leurs traditions.
Femme amazighe à travers l’histoire
La femme amazighe, à travers l’histoire, était déesse : Tanit, chef guerrier : Dihya, reine : Tin Hinan.
Tanit, la déesse
Tanith (Tanit) était une déesse mère de la fertilité et de la lune, adorée à Carthage (Tunisie actuelle), vers 814-146 avant notre ère. Elle était la déesse protectrice de Carthage et est apparentée à Ishtar et Astarte. Elle était l’épouse de Baal-Hammon, le dieu de la fertilité et divinité principale de Carthage.
Tanit était adorée dans les contextes puniques de la Méditerranée occidentale, en Sicile, à Malte, en Afrique du Nord, à Gadès et dans de nombreux autres endroits jusqu’à l’époque hellénistique. Les anciens Berbères d’Afrique du Nord ont également adopté le culte punique de Tanit.
Tanit, la reine céleste, est la déesse des amateurs d’étoiles et des astrologues. Déesse de la fertilité et de l’abondance, Tanit était l’esprit suprême de Carthage, la nation phénicienne d’Afrique du Nord, aujourd’hui surtout connue pour son héros Hannibal (247- entre 183 et 181 BC). Le règne de Tanit, qui a duré près de deux mille ans, du IXe siècle avant J.-C. à la conquête romaine, n’a été éradiqué que par l’Islam, bien que des rumeurs de vestiges de son culte parmi les tribus amazighes (berbères) des montagnes fassent périodiquement surface.
Tanit était une déesse internationale. Sa vénération s’est répandue dans les colonies phéniciennes dans ce qui est aujourd’hui Malte, la Sardaigne et l’Espagne. Septimus Severus (11 avril 146-4 février 211 de notre ère), le premier empereur romain né en Afrique du Nord, a introduit le culte de Tanit à Rome.
Tanit était la divinité primordiale en Afrique :  » l’aînée, mère des dieux, qui a illuminé le premier visage.  » Elle était  » représentée sans équivoque comme une créatrice autogénétique/parthénogénétique « . Elle est le « premier acte conscient de création à partir du vide, qui prend le potentiel inerte de la Nonne et provoque le début de la création« . Les Mères Primordiales ont des attributs communs car elles sont une seule et même personne, avec des distinctions culturelles mineures : Tanit de Tamazgha, Neith de Libye, Anat de Canaan, Isis d’Afrique, Athéna de Grèce, Ngame d’Akan, etc.
Son nom pourrait être dérivé de netet qui signifie « tricoter, tisser« .  Tanit a tissé le monde sur son métier à tisser, et son icône comprend souvent un symbole de métier à tisser.  En tant que patronne des tisserands, elle fournissait les bandages en lin utilisés pour la momification et les soins respectueux des morts. Aujourd’hui, le tissage de chaque tisserande est le symbole de son devenir, une continuation du pouvoir parthénogénétique du Premier Principe.
À l’origine, Tanit était une déesse de la lune, peut-être la même qu’Ishtar ou Astarte. Lorsqu’elle a atteint l’Afrique, elle semble avoir absorbé une déesse berbère plus ancienne qui était peut-être un peu la même. Les artistes ont parfois dessiné ou sculpté Tanit en tant que femme, et l’ont parfois simplifiée en un triangle (représentant sa robe) avec un cercle au sommet (représentant sa tête) et une ligne transversale (représentant ses bras).
Il y a débat pour savoir si Tanit est une importation phénicienne ou une indigène amazighe (berbère). Il est possible qu’elle soit les deux. Tanit peut être une déesse amazighe qui a été identifiée comme Astarté par les Phéniciens. Tanit peut aussi être un autre nom pour Neith.
Même après que de nombreux peuples d’Afrique du Nord soient devenus chrétiens dans les années 300, il y avait encore beaucoup de gens qui vénéraient leur ancienne déesse Tanit. Mais lorsque la plupart des gens se sont convertis à l’islam vers 700, ils ont progressivement cessé de vénérer Tanit et l’ont oubliée.
Tanit, était, en perspective, une déesse berbère de la prospérité, de la fertilité, de l’amour et de la lune, la première déesse punique, et phénicienne de la divinité centrale de la période antique, les militaires amazighs pratiquaient certains rituels en son honneur. Son symbole est un cercle et un triangle séparés par une ligne.
Les poètes et les savants de tous les âges l’ont connue sous le nom de la déesse Neith. Il ne fait aucun doute que la Nit des anciens Égyptiens, la Tanit des Phéniciens et l’Athéna des Grecs n’étaient autres que la déesse libyenne Tannit.
La déesse Neith est l’une des plus anciennes déesses du monde et son sanctuaire est attesté en Égypte depuis l’époque prédynastique. Elle était la divinité protectrice de la ville de Sais, dans le delta occidental du Nil, en Basse-Égypte.
Son nom berbère Tannit signifierait Ta-Nit, c’est-à-dire « la terre de Nit », en référence à l’ancienne Libye (l’ensemble de l’Afrique du Nord d’aujourd’hui) qui était son foyer originel. Selon Hérodote, Tannit (qu’il appelait Athéna) était vénérée par les Amazones libyennes autour du lac Tritonis.
La signification du nom de Neith a été interprétée de nombreuses façons, la plus populaire étant celle qui l’associe à l’eau en tant que personnification des eaux primordiales de la création, ce qui fait d’elle la déesse créatrice. Son nom l’associe également à la « sagesse » et à la « loi » et, à ce titre, elle était l’arbitre dans la dispute entre Horus et Seth et donc la gardienne de l’ordre cosmique.
Edouard Lipinski avance l’hypothèse d’un lien avec une racine sémitique t-n-y, « se lamenter », donnant à son nom le sens de « Celle qui pleure » ; il en déduit que son épithète Tanit Pene Baal devrait être traduite à juste titre par « Celle qui pleure devant Baal ». Cependant, une fois de plus, cette théorie repose sur un mot obscur : comme le souligne Robert M. Kerr, la racine t-n-y n’est attestée que deux fois dans l’Ancien Testament, et dans les deux cas, elle peut également signifier « répéter » ou « réciter ».
Une théorie plus récente, proposée par Theo Vennemann, relie le nom de Tanit à la racine sémitique m-n-h et au mot manah, qui signifie « compter, décompter ou attribuer », inclus entre la « t-féminisation » chamito-sémitique. Il cite les divinités du Proche-Orient Manat (arabe), Meni (hébreu) et Ishtar Menutum (mésopotamien), toutes déesses de la fortune, qui englobent à la fois le destin et la richesse, comme étant nommées à partir de la même racine linguistique.  Vennemann souligne en outre que le visage de Tanit sur la monnaie de Carthage correspond à celui de Junon Moneta sur la monnaie de Rome.  L’épithète Moneta a généralement été associée au verbe latin monere, ‘’avertir ou conseiller’’, mais Vennemann suggère une origine sémitique – manah – à partir de laquelle, selon lui, les mots argent/monnaie et mois/lune peuvent également être tracés. Cela correspondrait bien au rôle de Dea Coelestis, partagé par Tanit et Junon, qui englobe la mesure des jours solaires et des mois lunaires, les cycles de fertilité des femmes, ainsi que la prospérité et la fortune de la cité-état.
Dihya: chef guerrier
Dihya (en amazighe : ⴷⵉⵀⵢⴰ), aussi connue sous le nom de Kâhina ou Kâhena كاهنة chez les arabes, est une reine guerrière berbère qui a combattu avec acharnement lesconquérants musulmans (Omeyyades).
On sait très peu de choses sur la vie privée de Dihya. Il est difficile de distinguer la réalité de la fiction dans les nombreuses légendes qui l’entourent. Dihya est née fille de Tabat, un chef de la tribu des Jrawa, qui vivait dans la région des monts Aurès. Certains historiens (juifs pour la plupart) affirment que Dihya a professé le judaïsme. Ils soulignent que son titre arabe, « al-Kâhina », pourrait être une corruption du mot hébreu kohen, qui signifie « une personne de la classe des prêtres ». Le nom de famille Cohen dérive de cette racine sémitique.
De plus, une chronique arabe, celle d’Ibn Khaldoun, écrite des siècles après sa mort, appelle Dihya « une juive ». Il est possible que la reine berbère ait suivi la religion juive, mais il n’existe aucune preuve solide à cet égard. En effet, de nombreuses tribus berbères professaient le judaïsme à cette époque, mais d’autres avaient également des croyances chrétiennes ou traditionnelles.
Il est possible qu’elle ait eu une ascendance mixte : berbère et chrétienne byzantine, puisque l’un de ses fils est décrit comme un  » yunani  » ou grec. Toujours selon l’historien arabe al-Maliki, elle aurait été accompagnée dans ses voyages par ce que les Arabes appelaient une « idole », peut-être une icône de la Vierge Marie ou de l’un des saints chrétiens.
Les légendes conservent quelques détails de l’apparence de Dihya. Elle avait de très longs cheveux noirs et de grands yeux sombres. Elle était extrêmement grande pour une femme de l’époque. On dit d’elle qu’elle était charismatique, et les auteurs lui attribuent le don de prévoyance – très probablement une réminiscence de sa grande intelligence et de sa sagesse.
Lorsqu’elle était une jeune femme, un chef qui exigeait de la posséder comme épouse terrorisa sa tribu. Dihya s’est cachée pendant un certain temps. Finalement, elle accepta le mariage. La nuit de noces, elle tua son nouveau mari en lui fracassant le crâne avec un clou. Bien qu’elle puisse être apocryphe, cette histoire, comme beaucoup d’autres dans sa biographie, met en évidence sa volonté et sa détermination farouches.
En 646 après J.-C., après que les musulmans eurent achevé leur conquête de l’Égypte, ils tournèrent bientôt leurs regards vers l’Afrique du Nord romaine. L’Exarchat d’Afrique se retrouve en première ligne de la guerre contre l’État arabe en expansion. L’Empire byzantin, qui subissait lui-même des défaites sur presque tous les fronts et était encore plus affaibli par une guerre civile constante, ne pouvait apporter aucune aide à une province aussi éloignée. L’Exarchat a dû s’en remettre entièrement aux ressources locales, limitées. Le fait qu’ils aient réussi à repousser l’avancée des musulmans pendant si longtemps témoigne de la résistance enthousiaste de la population locale contre les Arabes.
Ce n’est qu’en 680 que les Arabes ont finalement percé les défenses de l’Exarchat. Alors que les Romains se barricadaient dans les villes côtières, un commandant musulman du nom d’Oqba a mené un raid le long de la côte qui a atteint l’océan Atlantique dans le Maroc moderne. Il est dit dans les sources musulmanes qu’Oqba a fendu les vagues de l’océan avec son sabre, furieux qu’il n’y ait plus de terre à conquérir. À son retour en 683, cependant, l’armée d’Oqba fut anéantie par une coalition de tribus berbères, et lui-même fut tué.
Pendant le siège de Carthage, Dihya a accompli l’œuvre de sa vie. Elle a rassemblé toutes les principales tribus berbères dans un but commun : chasser les envahisseurs. Commençant par une guérilla, elle est rapidement passée au lancement d’une invasion à grande échelle contre les musulmans. Elle est rejointe dans cette entreprise par les survivants de l’armée byzantine, ainsi que par les restes des Wisigoths locaux.
Dihya a attaqué la principale armée musulmane, l’a complètement vaincue et a repoussé les envahisseurs en Égypte. Elle a même récupéré les ruines de Carthage. À ce moment-là, elle était l’héroïne incontestée et le chef de toute la population africaine, qu’elle soit nomade, berbère ou romaine. Tous les groupes ethniques et religieux s’unissent sous sa bannière. Elle a également été rejointe par quelques déserteurs de l’armée musulmane. L’un d’entre eux, probablement un apostat, devient son lieutenant et son fils adoptif. C’est également à cette époque qu’elle obtient son célèbre surnom arabe.
Dihya semblait sur le point de créer un État indépendant. Elle dirigeait d’une main de fer. Elle transforme rapidement les tribus berbères anarchiques en une armée disciplinée. Elle a fait preuve de grandes compétences militaires et administratives. Elle a réussi à tenir les musulmans en échec pendant une longue période, peut-être même pendant trois ans. Elle a également mis en place une administration capable de maintenir une grande armée permanente pendant cette période. Dihya s’est préparée au retour des Arabes.
L’un des épisodes les plus étranges de la lutte de Dihya contre les musulmans a été la défection de ses trois fils naturels. Ceux-ci ont rejoint les musulmans et se sont convertis à l’islam selon les sources traditionnelles, affirmant qu’ils l’ont fait sur un ordre péremptoire donné par leur mère. Certains spéculent que Dihya savait qu’à long terme elle n’avait aucune chance d’arrêter les musulmans, et a décidé que c’était le seul moyen de sauver la vie de ses fils bien-aimés. D’autres auteurs soupçonnent que ses fils sont venus pour faire de l’espionnage et du sabotage. Même si cette deuxième option est vraie, Dihya n’a eu aucune chance d’utiliser les compétences de ses fils. La cause exacte de sa chute, et la date à laquelle elle s’est produite, n’est pas certaine.
Les chroniqueurs musulmans accusent Dihya d’avoir pratiqué une « politique de la terre brûlée » dans l’espoir de faire renoncer les musulmans à leurs projets d’invasion. Pour cette raison, ils disent qu’elle a ordonné à ses hommes de brûler les villes, de tuer le bétail et de détruire tous les champs. Selon les chroniques islamiques, l’Afrique s’est transformée en désert sur ses ordres. Les musulmans disent que ces actions lui ont fait perdre le soutien de la population sédentaire, qui était terrifiée par la destruction. Les paysans et les citadins sont devenus, à partir de cette époque, des observateurs passifs du conflit. Les chroniqueurs arabes disent fièrement qu’une telle destruction ne pourrait jamais les arrêter, puisque la principale raison des conquêtes islamiques était la mise en œuvre de la règle d’Allah.
Pour Moderan, Dihya est un chef guerrier de grande envergure :
‘’La Kahena est probablement la figure la plus célèbre et aussi la plus mal connue de l’histoire de la résistance berbère à la conquête arabe au viie siècle.
Se fondant principalement sur les récits de Ibn Ḵẖaldûn et de Ibn cIḏẖârî, deux auteurs du XIVe siècle, l’historiographie moderne a donné de sa vie une version qui a elle-même été le support de toutes sortes de fictions littéraires ou poétiques. Selon ces récits, lorsque, vers 688-89 ou 692-93, le général arabe Hassan fut nommé gouverneur de la nouvelle province d’Ifrîqiyya, reconquise par son prédécesseur après la défaite et la mort de Koceila, on lui apprit que l’ennemi le plus menaçant pour les musulmans était la Kahena, « reine du Mont Auras » (l’Aurès), et chef de la tribu des Djeraoua (Ḏjarâwa), qui elle-même était à la tête de tous les Berbères Botr. Hassan l’attaqua, mais fut vaincu. Il s’enfuit vers la Cyrénaïque (« le pays de Barka »), tandis que la Kahena devenait maîtresse de toute l’Ifrîqiyya. Cinq ans plus tard, le général revint à l’assaut, et bénéficia d’informations d’un jeune Arabe fait prisonnier par la Kahena, Ḵẖaled, ainsi que du soutien des populations locales, tyrannisées et ruinées par la reine qui avait décidé d’appliquer la tactique de la terre brûlée pour décourager les conquérants musulmans. Hassan fut vainqueur et la Kahena, qui avait prédit son sort, fut tuée dans l’Aurès, près du lieu dès lors appelé Bîr al-Kahina. Mais ses deux fils, qu’elle avait envoyés avant la bataille auprès du général, devinrent les chefs d’un contingent de 12 000 Berbères désormais intégrés à l’armée arabe.’’

Dihya se retrouve bientôt le seul ennemi du califat arabe sur le continent africain. Le califat envoie des forces considérables et finit par vaincre ses guerriers berbères. Les sources diffèrent sur la façon dont elle est morte. Certaines disent qu’elle est morte en soldat, une épée à la main. D’autres affirment qu’elle s’est empoisonnée lorsque tout était perdu et que la défaite était proche. La date exacte de sa mort est également inconnue. Elle s’est produite entre les années 702 et 705. La tête de Dihya fut momifiée et envoyée au calife, qui ordonna qu’elle soit clouée à l’entrée de sa mosquée préférée.
Après la mort de Dihya, le sort de l’Afrique a été scellé. Toute résistance organisée à grande échelle a cessé d’exister, bien que des tribus berbères éparpillées aient poursuivi la résistance armée pendant un certain temps. Dans tous les traités conclus avec les Berbères, les musulmans exigent la conversion à l’islam. Face à la menace d’une destruction totale, la plupart des tribus acceptèrent d’abandonner leurs anciennes croyances. Celles qui n’acceptaient pas la nouvelle religion étaient tuées. On dit que de nombreuses femmes berbères se sont suicidées à la suite de la défaite de Dihya.
Tin Hinan : reine amazighe
La reine Tin Hinan, également connue sous le nom de ‘’Reine du Hoggar’’, et par les Touaregs « Tamenokalt » qui signifie également « reine », est une femme légendaire qui a vécu au IVe siècle. La signification littérale de Tin Hinan est « celle des tentes ». On pense qu’elle est l’ancêtre de l’ethnie touareg d’Afrique du Nord ; ils l’appellent « la mère de nous tous ». Le Hoggar est une série de montagnes situées dans les régions montagneuses du Sahara central. Elle était célèbre pour sa beauté, sa sagesse et était connue pour voyager assez souvent.
L’histoire de Tin Hinan avait déjà été racontée depuis longtemps, et beaucoup croyaient qu’il s’agissait simplement d’une légende ou d’un mythe. Cependant, au fil des siècles, son personnage s’est progressivement fondu dans le mythe et le folklore jusqu’à la découverte et l’ouverture de sa tombe en 1925 par Byron Khun De Porok. Cette découverte a réaffirmé son existence, prouvant qu’elle était un personnage historique. Située non loin de l’oasis d’Abalessa, en Algérie, à environ 1550 kilomètres au sud d’Alger, sur une colline arrondie s’élevant à 38 mètres au-dessus de la jonction de deux oueds,se trouve la tombe de Tin Hinan en forme de poire avec un grand axe d’environ 27 mètres. Elle contient 11 pièces ou cours.
Comme de nombreux personnages légendaires vieux de plusieurs siècles, sa véritable origine est entourée de mystère. Malheureusement, comme les Touaregs de l’époque ne conservaient pas de documents écrits, les récits oraux des habitants sont une option clé pour retracer son histoire. Certaines sources affirment que Tin Hanin était une princesse chassée du Sahara septentrional, et qu’après un voyage proche de la mort à travers le désert du Sahara avec son entourage, ils ont atteint la fourmilière du désert où ils ont heureusement trouvé du grain.
Certains disent qu’elle était une Berbère venue de l’oasis de Tafilalt avec sa servante Takamat; qu’elle aurait eu une fille appelée Kella; ils se sont installés dans la région montagneuse de l’Algérie. On ne trouve nulle part de trace de sa tribu, de l’identité de son mari ou amant, des raisons de sa migration vers le Hoggar, de l’identité de ses parents ou de la cause de sa mort. Takamat a eu deux filles. Les historiens croient que Tin Hinan a donné les oasis de Silet et d’Ennided aux deux filles de Takamat, qui jusqu’à nos jours appartiennent aux descendants des deux femmes.
Les réalisations de Tin Hinan n’étaient pas des moindres. En tant que femme venant d’un pays étranger, elle a dû s’établir sur le nouveau territoire et, à en juger par le traitement réservé aux femmes par l’histoire à cette époque, on ne peut qu’imaginer son niveau de sagesse, d’intelligence, de courage et d’endurance alors qu’elle surmontait l’opposition, gagnait le cœur du peuple, l’unissait et s’élevait pour devenir sa reine. Et aujourd’hui encore, plusieurs siècles plus tard, des festivals sont organisés en son honneur.
Elle était considérée comme une guerrière intrépide ; de nombreux Touaregs la surnomment aujourd’hui la reine amazone africaine. Elle possédait une connaissance des herbes pour la guérison et des pratiques médicinales, enseignait à son peuple la poésie et l’alphabet tifinagh. Sa plus grande réussite a été de fonder et d’unir les Touaregs et d’établir un royaume dans le Hoggar. Sa fille Kella est généralement considérée comme la fondatrice de la tribu Kel Rela.
Sous la direction de la reine Tin Hinan, les Touaregs ont établi des routes commerciales essentielles pour les caravanes, grâce auxquelles ils ont acquis une grande richesse et une prospérité économique tout au long des IVe et Ve siècles. Bien qu’elle soit largement considérée comme la fondatrice des Touaregs, on estime que la tribu Ihadanaren descend directement d’elle tandis que les tribus Plebean de Dag Rali et Ait Loaien descendent de Takamat. Des festivals sont organisés chaque année en l’honneur de Tin Hinan dans la ville oasis de Tamanrasset, dans le sud de l’Algérie, entre le 20 et le 28 février de chaque année.
Les femmes amazighes, piliers de la culture
Les femmes amazighes ont été les gardiennes des traditions et de la langue tout au long de l’histoire. Les femmes berbères du Maroc ne font pas exception. Malgré un brassage culturel au cours des siècles – principalement dû aux conquêtes – la culturelle de la tribu amazighe a survécu.
L’artisanat berbère se caractérise par des symboles indigènes que l’on retrouve dans les tissages, les bijoux, la poterie, les tatouages et même les peintures corporelles au henné.
Pour Siham Fadel, les femmes amazighes sont des authentiques gardiennes de la tradition :
‘’Les femmes marocaines, comme d’autres dans différentes parties du monde, contribuent à l’éducation des générations et à la transmission du patrimoine oral à travers les contes, les poèmes, les devinettes et les proverbes. Elles entretiennent également le patrimoine physique comme les vêtements, le textile et les bijoux.’’
L’identité berbère s’est développée il y a des milliers d’années sur un vaste territoire (Tamazgha) qui s’étend des Iles Canariesde la côte atlantique du Maroc jusqu’en Egypte (oasis de Siwa), sur un axe ouest-est, et de la Méditerranée occidentale aux confins du Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Burkina Faso) , sur un axe nord-sud.
Le peuple amazigh est reconnu pour ses hautes vertus morales, dont le respect des personnes âgées, la protection des voisins et des hôtes, le renoncement à la vengeance et la haine de l’oppression, la protection de l’étranger et de l’opprimé, entre autres. La culture du peuple berbère imprégnée par les influences méditerranéennes, africaines, orientales, européennes ou internationales, se distingue tout particulièrement par :
Le tapis amazigh
Dans un geste éminemment féminin, les femmes amazighesbrodent des tapis enchanteurs. Elles tissent leurs rêves, ou rêvent ce qu’elles tissent, grâce à des fils de laine qui lient l’histoire des communautés berbères depuis des siècles.
Les femmes tissent des tapis berbères depuis l’âge néolithique. Cependant, les techniques et les symboles traditionnels incorporés sont spécifiques à chaque région du Maroc, de même que les usages. Les couleurs étaient généralement vives et les motifs simplistes, mais au fil du temps, ils sont devenus encore plus éclatants et complexes. Ces tapis se reconnaissent à leur texture de nœud distinctive et à leur grande durabilité, et le tissu filé à la main en fibres de laine de mouton naturelle sont baptisés du nom de la tribu.
Les tapis épais et lourds étaient idéaux pour les habitants des montagnes de l’Atlas, tandis que les nattes légères tissées à plat et les hanbels étaient adaptés au climat brûlant du désert du Sahara. Les hanbels, quant à eux, étaient généralement de conception simpliste et moins colorés que les tapis plus lourds.
Les tapis berbères modernes sont bien sûr fabriqués aujourd’hui dans le monde entier à l’aide de nylon, d’oléfine et de laine, mais les authentiques tapis berbères du Maroc sont toujours fabriqués à la main. Les tapis et tentures murales modernes sont souvent de couleurs vives ou de teintes profondes de rouille et d’orange et ne doivent pas être confondus avec les produits berbères traditionnels tissés à la main.
Le hanbel, qui signifie « tissage » en langue berbère, est une pièce tissée plus légère et plus fine que le tapis. Il peut remplacer le tapis, plus lourd, mais il peut aussi être utilisé comme couverture, tapis de couchage ou coussin. Lors des célébrations, les hanbels sont souvent utilisés comme décorations murales, comme une tapisserie.
Les crépines des métiers à tisser (utilisées pour maintenir le tissu à une largeur constante), les peignes de tissage en fer et en bois (utilisés pour tisser les tapis épais et comprimer les rangées de nœuds noués) et les quenouilles (bâtons de bois) sont tous des éléments nécessaires au tissage.
Entre les massifs de l’Atlas et de l’Anti-Atlas, où les ressources sont limitées, où la végétation est rare, le tapis est une ressource vitale pour ces familles berbères de tradition pastorale. Mais plus qu’une ressource essentielle, le tapis berbère est l’écho de ces territoires qui ont accueilli ces tribus au point de devenir au fil du temps, l’écrin de leur identité, où se mêlent à une géométrie abstraite et énigmatique, les symboles de la culture amazighe.
La montagne citadelle, le Jebel Sirwa est un massif intermédiaire, situé entre les deux sommets de l’Atlas. Depuis le VIIIe siècle, cette terre de transhumance abrite des communautés berbères dont l’économie repose sur l’activité pastorale. Ses bergers sont connus pour la spécificité de leurs moutons, leur laine, cette matière à la fois unique et universelle, relie le tapis à l’élevage.
Réputée soyeuse et brillante, la laine du Sirwa est perçue comme un don du ciel, et revêt un caractère sacré, elle est l’âme du tapis et renvoie à la mémoire de générations d’éleveurs et de tisserands, qui ont lentement et conjointement développé ce savoir-faire traditionnel.
Ces tapis sont aussi l’expression de l’identité des territoires des Ait Ouaouzguit. Ils sont tissés dans les douars, ces anciens villages de tentes, fixes ou mobiles, d’où sont originaires les populations berbères. Les douars sont rattachés à des communes regroupant les descendants de ces tribus nomades, aujourd’hui sédentarisées.
Grâce à ces douars, ces regroupements d’habitations, les nomades ont pu avoir une stabilité, ils ont pu subvenir à leurs besoins en eau, cela leur a également permis de cultiver leurs terres, d’avoir accès à l’agriculture pour se nourrir, nourrir leurs enfants et leurs troupeaux. Cet environnement a également aidé les gens à se stabiliser au sein de ces douars. L’évolution de leur mode de vie a poussé la plupart d’entre eux à s’installer définitivement, notamment pour que leurs enfants puissent avoir accès à l’éducation.
Sur la commune rurale d’Iznaguen, qui regroupe une quinzaine de douars, le tapis berbère est aussi le flambeau de l’art des femmes. Elles mettent tout leur soin lorsqu’elles lavent, peignent et tissent cette laine à l’origine du prestigieux tapis Ouaouzguit. Elles sont les artisanes et les gardiennes de cette tradition ancestrale.
Les femmes berbères fournissent des couvertures, des djellabas, des manteaux de bergers ou encore des chaussures tressées qui sont utilisées pour les différents moments de la vie quotidienne.
Les Berbères ne s’habillaient qu’avec la laine de leurs moutons jusqu’à l’introduction du coton au Maroc au début du XXe siècle.
Bijoux
La société amazighe met l’accent sur l’apparence, c’est donc très tôt que les jeunes femmes commencent à se parer de tatouages et de bijoux. Mais au-delà de l’aspect esthétique, les bijoux indiquent l’appartenance de la jeune femme, on sait donc à quel peuple ou tribu elle appartient.
Les peuples amazighs étant de tradition orale, il existe très peu d’écrits sur leur histoire et leurs coutumes. C’est à travers des pièces artisanales telles que les bijoux ou les tapis que l’essence de leur culture est révélée. Ainsi, les bijoux racontent une histoire, les symboles, les lettres tracées dans le Tifinagh sont un code que seul l’œil avisé peut comprendre.
En plus de pouvoir se définir par une combinaison unique de colliers, de bandeaux, de boucles d’oreilles et de bracelets, les femmes amazighes portent également des bijoux berbères en raison de leur puissante signification :

Les bijoux sont transmis de mère en fille.  Les bijoux sont offerts en dot aux femmes lors de leur mariage par leur mari ou leur beau-père.
Ce n’est pas seulement une question de coquetterie, ou de possessions matérielles, mais c’est son histoire que chaque mère transmet à sa fille comme elle lui a donné sa vie. C’est une histoire qui se grave, se chuchote, se poursuit à travers les âges grâce à ses bijoux qui passent de génération en génération.
Dans le sud marocain, on trouve de nombreuses parures de tête ornées, mêlées d’argent, de verre, de coquillages et de cuir. Une pierre indigène de la région du Souss, à prédominance juive, au Maroc, utilisée dans les colliers est l’ambre, complétée par de l’argent, des perles de verre et des objets en émail. Les pendentifs sont principalement composés d’argent, d’émail et de pièces de verre. Les colliers sont très lourds, en particulier ceux avec les grosses pierres d’ambre.
Articles de toilette pour femmes
Parmi les articles de toilette pour femmes on trouve des peignes en bois, des bols à cosmétiques, des vanneries et des récipients en bois utilisés pour conserver les préparations à base de henné font partis du trousseau de toute femme berbère qui se respecte. On trouve aussi des pilons de mortier utilisés pour mélanger les plantes et les teintures pour les cosmétiques, ainsi que les boîtes en bois, en cuivre et en peau moulée pour conserver les cosmétiques et les bijoux, qui sontindéniablement des articles courants dans le ménage de la femme berbère.
Articles ménagers
La plupart des ustensiles de cuisine et des jarres étaient fabriqués par les femmes amazighes en terre cuite avec des pigments colorés. Elles offrent un aperçu intéressant d’une culture qui a perduré malgré la technologie moderne d’aujourd’hui et l’intrusion destructive du plastique, très pratique certes dans la vie quotidienne, mais ennemi mortel de la poterie fabriquée et décorée par les femmes et amie de la nature pour sa nature pleinement biodégradable.
Tatouage
Le tatouage est l’un des plus anciens rites connus des Imazighen. Le mot tamazight pour tatouage vient du mot akrad (vacciner). Les tatouages étaient utilisés pour la parure classique mais avaient également un usage médical. Les tatouages pouvaient être faits pour guérir (ou aider à guérir) par exemple l’arthrite, un os cassé mais aussi l’infertilité ou pour « drainer » les maladies. En tant que tel, il s’agit d’un outil magique. Les tatouages sont également un outil d’identification important, les symboles indiquant de quelle tribu et de quelle région on est originaire. Pour certaines tribus amazighes, le tatouage était un moyen d’effrayer les conquérants et de les protéger contre l’emprisonnement.
Même si les tatouages chez les Amazighs étaient surtout destinés aux femmes, au Maroc et en Tunisie, on peut encore trouver de nombreux hommes dans les régions amazighes qui ont de petits tatouages sur la main, sur les bras ou la poitrine. Ces tatouages indiquent leur appartenance à une certaine tribu et sont destinés à être vus lors d’une poignée de main.
Il n’existe pas de sources écrites officielles pour identifier les différents symboles que l’on trouve dans les différentes diasporas amazighes. La plupart des sources essayant d’expliquer les symboles sont fortement influencées par les explications d’une petite partie seulement des Imazighen et ne peuvent être vraies pour chaque tribu.
Alan Fox explique le tatouage amazigh dans les termes suivants :
‘’Le tatouage est l’un des plus anciens rites de la culture berbère, dont les origines remontent à la période pré-islamique. Ces ethnies berbères, dont l’on retrouve des traces datant de l’antiquité pharaonique, tribus nomades et groupes berbérophones, ont historiquement une présence dans plus d’une dizaine de pays africains, du Maghreb méditerranéen à l’Afrique sub-saharienne en passant par l’Égypte et le Niger, de l’océan Atlantique au rivages du Nil.
Le tatouage berbère est lié à un ensemble de rites païens de sorcellerie et de magie. Ces croyances sont toujours l’objet de coutumes dans les campagnes, où l’Islam n’a que partiellement intégré ces anciennes pratiques et croyances. Le tatouage appelé « el-âyacha » (« celui qui fait vivre »), est parfois encore pratiqué en milieu rural, où les femmes, depuis toujours, protègent leurs enfants du mauvais sort et de la malchance en leur dessinant sur le front avec du noir de fumée par exemple. On retrouve cette coutume lorsque le jour de la naissance d’un enfant coïncide avec un événement néfaste. Le tatouage a ici une fonction de communication entre le corps humain et le monde des esprits. Aujourd’hui, au Maghreb, le tatouage au henné fait encore partie des traditions berbères, le côté ornemental ayant de longue date pris le dessus depuis longtemps sur le sens magique primitif.’’
Tissage et préservation de la tradition orale
Les femmes ont donné une représentation physique à leur culture, leur histoire et leur vie, qui transcende le temps et l’espace. Chaque tapis, tapisserie, couverture, etc. raconte une histoire. Parmi les thèmes principaux des histoires racontées par les tissages sont la nature, le cycle de la vie et la maternité. Ce sont les femmes qui maintiennent la culture vivante en racontant ces histoires profondément personnelles que de nombreux membres de leur communauté peuvent partager et s’identifier avec.
Les femmes amazighes non seulement une œuvre d’art mais aussi un registre littéraire qui contient un nombre défini de motifs qui semblent, un langage, à part qu’il faut déchiffrer dans le temps. Dans plusieurs régions du Maroc, le tapis a aussi une fonction de calendrier utiliser par la gente féminine pour garder en mémoire la durée de la grossesse. Ainsi, avant de tomber enceintes, les femmes préparent la laine et monte le métier à tisser et lui ‘’donnent vie’’, puis une fois enceinte elles utilisent le tapis pour compter les mois avant l’accouchement. Ainsi juste avant de donner la vie à un être humain, elle donne la vie à une œuvre artistique de grande valeur symbolique qu’est la création et la vie. Dans sa forme le tapis-calendrier, contient neufs bandes et commence large et finit étroit, une représentation symbolique de mettre bas et de donner naissance à un être cher.
Les mères partagent ces compétences en matière de tissage, de tatouage, de poterie, et d’autres formes d’art avec leurs filles. Les modèles sont transmis de génération en génération, de sorte que les noms des symboles et des motifs varient selon lesunités familiales.
La langue et la culture berbères ont été marginalisées depuis la post-colonisation du Maroc, le tissage est un autre langage et un autre véhicule pour transmettre la narration. En racontant des histoires à un niveau global à travers cette tradition, une lumière est jetée sur la culture locale, aidant à la préservation du dialecte berbère original. Cynthia Becker écrit, à ce propos que :
[« les arts visuels sont devenus un moyen important pour les activistes de construire une identité transnationale, reliant les membres du mouvement culturel et linguistique amazigh par-delà les frontières nationales ».]
“visual arts have become an important means by which activists construct a transnational Amazigh identity, linking members of the Amazigh cultural and linguistic movement across national borders.”
Les motifs et les dessins tels que les triangles, les bandes et les zigzags ont des significations symboliques qui leur sont associées. Par exemple, le triangle est considéré par les érudits comme une main abstraite à cinq doigts, représentant les cinq piliers de l’Islam. Le motif du diamant ou du losange est une représentation géométrique de l’utérus. Il s’agit de l’un des symboles les plus répandus et les plus utilisés dans le tissage des tapis berbères. Par exemple, un élément aussi subtil que le fait qu’un point est placé à l’intérieur ou à l’extérieur d’un triangle peut indiquer si une femme a été enceinte ou a perdu un enfant à l’époque où elle a tissé ce segment.
Un autre fil de la tapisserie métaphorique du patrimoine culturel marocain est un fort élément spirituel associé aux tissages des femmes berbères/amazighes. Au moment où une femme attache les fils de chaîne au métier à tisser, c’est le moment où le textile  » naît  » et a une âme. Puis, tout en tissant (souvent pendant des mois pour un seul tapis), elle raconte des histoires. Avec le choix et l’emplacement des symboles ainsi que les couleurs sélectionnées, une histoire se construit, et c’est la vie que vit le textile. Lorsqu’il est terminé, la tisserande dit une prière pour le textile, le coupe du métier à tisser et il « meurt ». Ce cycle de vie métaphorique vécu par le textile durant le processus de tissage signifie que la femme qui le tisse sera protégée des êtres spirituels, appelés jnûn (singulier : jann), qui peuvent affliger ceux qui traversent les transitions de la vie.
Le folklore et la spiritualité des Berbères sont littéralement tissés dans le tissu de leur culture. Chaque tapisserie, tapis, vêtement, etc. contient des histoires, des légendes, des symboles et des motifs de protection. Becker écrit :
[« Les tisserands marocains saupoudrent du sel autour d’un métier à tisser, qui protège le tisserand des jnun, dont on dit qu’ils en sont repoussés. »]
Comme mentionné, les femmes berbères tissent les récits de leur peuple dans les tapis. En retour, en plus de gagner crédit immédiat sur l’échange d’informations, le récit social peut conférer un statut général à ceux qui fournissent constamment des informations de grande valeur et à faible coût : des informations qui ne sont pas déjà connue, pertinente pour les situations des auditeurs, inattendue…
La croyance est que la laine contient la bénédiction ou « baraka » et souvent cette baraka est transférée aux femmes qui tissent. Maintenir le statu quo et les femmes conservent cette position d’estime (qui leur est attribuée en tissant les histoires de leur culture dans les tapis) permettrait une vie culturellement plus riche, mais financièrement plus pauvre et plus marginalisée.
Les femmes amazighes qui tissent sont dotées d’un statut, d’un honneur et d’un respect pour le maintien de leur héritage culturel. D’une certaine manière, les femmes sont responsables de la survie du peuple berbère. Cette responsabilité est d’une grande importance, mais aussi d’un grand poids. Ces femmes ont créé une forme d’art qui englobe la culture et les récits de leur peuple, mais elles sont également responsables de l’entretien de ces récits et du maintien de la production. Les femmes sont :
[« les principaux acteurs de la préservation de l’identité berbère »]
“the main actors in the preservation of Berber identity”
et la longévité de leur culture en dépend.
Les femmes sont les gardiennes de l’identité culturelle berbère et, grâce à l’artisanat du tissage de tapis, elles maintiennent leur culture vivante. L’histoire, les histoires et le patrimoine culturel de la tribu berbère sont préservés grâce à cet artisanat traditionnel. Le mode de vie nomade et la production textile (connaissances en matière de tissage) sont des représentations très appréciées du patrimoine culturel immatériel du peupleamazigh bien que, comme le souligne Crawford :
[ » la berbérité que l’on peut attribuer aux villageois est surtout une expérience vécue et inconscienteplutôt qu’une base notable de l’identité politique « ]
“what Berberness we might attribute to villagers is mostly a lived and unconscious experience rather than a notable basis of political identity”
Le concept de patrimoine, dans sa forme la plus simple, peut être défini comme la relation entre la modernité et le temps ;ou, en termes encore plus simples, une relation avec le passé.L’ensemble du tissage berbère est un patrimoine car il forme un pont entre le présent et les histoires et traditions anciennes du Maroc du passé. Il évolue avec les événements actuels, les tendances, les mouvements sociauxet subit une évolution physique au fil du temps.
Le tissage est une tradition vivante et
​​[« les tisserands s’engagent avec le présent, redéfinissant leur héritage textile en phase avec leur temps’’]
« weavers engage with the present, redefining their textile heritage in phase with their time”
Les tapis et les tapisseries constituent un instantané de l’histoire et de la vie d’un tisserand. Chaque tapis est unique, et souvent imprévisible, de nombreux tapis montrent qu’ils ont été tissés par plus d’une personne ou sur une longue période de temps. Le serrage des nœuds peut varier, ou la symétrie parfaite peut soudain devenir plus abstraite. Tout, de l’approvisionnement en matériaux de leur troupeau, la teinture de la laine à l’aide de plantes et d’épices, l’assemblage du métier à tisser vertical mobile et vertical, tout cela est une tradition culturelle qui s’est perpétuée au fil des siècles.

Les méthodes, les dessins et les motifs jouent un rôle essentiel dans la préservation de la culture amazighe dans son ensemble. Dans toute l’Afrique du Nord, les femmes utilisent des métiers à tisser verticaux depuis des générations, créant toute une gamme de produits de grande valeur artistique.
D’après Becker :
[« Ce type de métier à tisser consiste en un cadre en bois composé de deux poteaux verticaux et de deux traverses, ainsi que d’une tige de lice et de deux ou trois tiges de foule (utilisées ensemble pour séparer les fils de chaîne). »]
‘’This type of loom consists of a wooden frame made from two upright poles and two crossbeams, plus one heddle rod and two or three shed rods (used together to separate the warp threads).
En raison de leur assemblage simple, ce type de métier à tisser était déplacé sur de grandes distances au Maroc et dans le Sahara, et a permis la propagation des motifs et des modèles de style berbère très sophistiqués.
Les femmes amazighes, poètes et critiques des tares sociales
Tout au long de l’histoire, les femmes ont été les gardiennes des traditions et de la langue, assurant la préservation du patrimoine culturel des tribus. La transmission a été garantie par de nombreux symboles que l’on retrouve dans le tissage (l’apanage des femmes berbères), les bijoux, la vannerie, la poterie, les tatouages et la peinture corporelle au henné.
Les femmes sont au centre du patrimoine et de l’identité berbères. Elles font entrer la communauté berbère dans le paysage socio-politique – au niveau international et dans la conversation globale.
Les chants des femmes font partie intégrante du patrimoine musical berbère et se reflètent de plus en plus dans une multitude de genres divers.  Poètes, musiciennes, gardiennes de la tradition et innovatrices, elles sont toutes animées par une même passion : La reconnaissance de la culture amazighe ou berbère, tant au Maroc qu’au-delà des frontières.
Les femmes poètes berbères ont toujours existé. Mririda N’Ait Atiq, par exemple, est une poétesse monolingue et pré-lettrée(analphabète) dont la poésie a été enregistrée vers 1927-30 par un universitaire français: René Euloge.
Le hasard d’une halte à Azilal, en 1927, fit rencontrer René Euloge et la jeune poétesse pour en devenir l’un de ses plus dévoués serviteurs, comme l’atteste « Les chants de la Tassaout ».
‘’Elle n’avait pas atteint la trentaine. Jolie, elle ne l’était point, malgré des yeux immenses au regard expressif. Ses traits rudes donnaient à son visage au teint très clair précocement fané, un habitus singulièrement émouvant qu’on ne pouvait oublier’’, 
lit-on dans les prolégomènes de René Euloge.
Mririda N’Ait Atiq a exprimé l’amour à une époque où les femmes n’avaient pas de voix publique et où l’expression de l’amour, même par les hommes, était évitée…
‘’Dans les nuits baignées par la lune
Il m’appellera Mririda, Mririda,
Ce doux surnom qui m’est si cher.
Pour lui, je libérerai mon « zgharit » aigu,
Mon « zgharit » strident et prolongé,
Que les hommes admirent et que les femmes envient.’’
Pour Soundouss Chraibi, écrivant dans Telquel:
‘’‘’On m’a surnommée Mririda, Mririda, / Mririda, l’agile rainette des prés…” C’est en ces vers qu’elle se présente. Sa mystérieuse et légendaire histoire est celle d’une jeune Amazighe de la Haute Tassaout, au cœur du Grand-Atlas, qui se prostituait dans le souk d’Azilal. Mririda N’ait Attik aurait vécu entre 1900 et 1940, si son existence peut être factuellement prouvée, car l’épaisse brume de mystères qui l’entoure se décline en différentes légendes, inventions et fantasmes.
L’épaisse brume de mystères qui l’entoure se décline en légendes, inventions et fantasmes. Du haut de ses montagnes au climat rigoureux et au ciel étoilé, drapée d’un vieux manteau de laine dont elle ne se dévêtait pas, Mririda chantait des vers en tachelhit selon certaines versions, selon d’autres, et clamait ses amours…’’
Par contre pour Mostafa Oumkhoum, chercheur en littérature amazighe, la poétesse rebelle Mririda lui rappelle la femme de lettres du siècle des hétaïres, Veronica Franco, qui elle aussi après maints déboires de la vie devint fille de joie et exprima son amertume en vers :
‘’Au fur et à mesure que j’avançais dans la lecture, la personnalité de Mririda me rappelait dans sa substance celle de la célèbre Veronica Franco, l’illustre hétaïre poétesse au XVIème siècle ; c’était une fille de courtisane, elle a été mariée très jeune, mais son mariage tourne court et elle décide alors d’emboiter le pas à sa mère et devenir fille de joie. C’est l’une des plus célèbres courtisanes de Venise. C’est presque le cas de Mririda n’Ait Attik, la femme amazighe qui porte un regard sans concession sur son monde fait de bonheur, d’amour, de privation. Ses chants, sa subtilité sont ensemencés par les vallées et les monts du pays. Mririda est attachée à ses racines profondes. La foi et la raison font son histoire et fondent sa vraie nature : une femme amazighe de manque, un périple dans les ténèbres, dans les plaies et les gangrènes, dans les blessures indélébiles dans le temps et l’espace. Elle était étrange et sa poésie a priori inutile pour la population, Mririda ne cherche ni à faire vibrer la corde sensible, ni même à impressionner les gens.’’

Bien que les études anthropologiques du Moyen-Orient reconnaissent généralement le statut inférieur des femmes au Maroc, la « mosaïque » complexe de l’organisation sociale nationale, ethnique et tribale, il est difficile de faire des déclarations précises et significatives sur la région dans son ensemble. Même lorsqu’ils se concentrent sur un pays, les récits anthropologiques arrivent à des conclusions contradictoires sur le rôle des femmes.
Les ethnographes du Maroc comme Westermarck, Coon, Hart et Gellner se sont concentrés sur l’exercice du pouvoir officiel, formel et public et ont donc souligné l’hégémonie des hommes sur les femmes : une notion orientaliste complétement erronée sachant sans pour autant que la femme amazighe à la différence de la femme arabe avait les coudées franches dans sa société toujours matriarcale en esprit et en âme en dépit de l’islamisation.
Cette notion de domination masculine monolithique et de soumission féminine a été quelque peu modifiée par des études récentes sur la capacité des femmes à influencer les décisions masculines, un « pouvoir derrière les hommes ». Une théorie du « pouvoir derrière le trône » articulée par Roger Joseph.
Dans le Rif la poésie au féminin chante l’épopée glorieuse de l’émir Ben Abdelkrim, l’exil économique des hommes en Europe (zwa amân (traverser les eaux)), la bonté des saints et les tares de la société rifaine. Ces poèmes sous forme de couplets izrân sont déclamés publiquement lors de mariages ou d’autres célébrations sociales.
Dans sa présentation des poétesses rifaines, Terri Brint Joseph, ethnomusicologue américain, écrit :
[‘‘Au-delà de leurs fonctions sexuelles et sociales, les chants berbères permettent essentiellement aux jeunes femmes de s’adresser à l’ensemble de la communauté. La liberté de s’adresser à la tribu (tackbitch) ou à la communauté (dchar) dans son ensemble, est accordée à toute jeune femme qui souhaite se produire ; il s’agit toutefois d’un privilège propre aux jeunes femmes célibataires. Les femmes mariées, divorcées ou veuves n’ont pas le droit de se produire. Les hommes, même les chefs les plus puissants, ne peuvent pas s’adresser à l’ensemble de la communauté. Bien qu’ils utilisent les rassemblements tribaux pour parler aux hommes de tous les âges, ils ne peuvent communiquer qu’avec les femmes qui sont membres de leur propre famille ou qui sont liées à eux par le mariage. S’ils souhaitent atteindre d’autres femmes de la tribu, les mâles doivent utiliser leurs mères, leurs épouses, leurs sœurs ou leurs filles comme émissaires.’’]
‘’Over and beyond their sexual and social functions, the Berber songs essentially allow young women to address the entire community. The freedom to address the tribe (tackbitch) or community (dchar) as a whole, people of both sexes and all ages, is granted to any young woman who wishes to perform; it is, however, a privilege unique to young, single women. Married, divorced, or widowed women are not permitted to perform. Men, even the most. powerful leaders, cannot address the entire community. Although they utilize tribal gatherings to speak to men of all ages, they can communicate with only those women who are members of their own family or are related to them by marriage. If they wish to reach other women of the tribe, males must use their mothers, wives, sisters, or daughters as emissaries.’’
Et de poursuivre:
[‘’Les chansons que les femmes interprètent lors des mariages sont souvent explicitement critiques de la vie berbère. L’éventail des sujets de critique sociale est théoriquement aussi large que les intérêts des chanteurs…, par exemple, l’attaque s’en prend non seulement à la société autochtone, mais aussi aux pays d’Europe qui embauchent les Amazighs, créent de nouveaux schémas d’émigration dans la vie tribale, et contribuent à des bouleversements sociaux.’’]
‘’The songs women perform at weddings are often explicitly critical of Berber life. The range of subjects for social critique is theoretically as broad as any singer’s interests; for example, … a song, attacks not only native society but the countries of Europe that hire Berber labor, create new emigration patterns in tribal life, and contribute tosocial upheavals.’’
Conclusion :
L’identité berbère (amazighe) s’est développée il y a des milliers d’années sur un vaste territoire, Tamazgha, et s’est avérée aussi remarquablement résistante au brassage culturel avec d’autres civilisations méditerranéennes qu’aux diverses conquêtes. Tout au long de l’histoire, les femmes ont été les gardiennes des traditions et de la langue, assurant la préservation du patrimoine culturel des tribus. La transmission a été garantie par de nombreux symboles que l’on retrouve dans le tissage (l’apanage des femmes berbères), les bijoux, la vannerie, la poterie, les tatouages et les peintures corporelles au henné, la littérature orale (contes, fables, devinettes, proverbes, poésie, etc.), chants et dance, la médecine traditionnelle, et les us et coutumes.
Les femmes amazighes constituent le pilier incontournable de la famille et de la communauté amazighe d’hier et d’aujourd’hui. Elles sont les gardiennes d’un savoir et d’un savoir-faire ancestraux, qu’elles véhiculent à travers leur langue maternelle, vecteur de valeurs et d’identité.
Faisant usage de la mémoire vive et collective, les femmes, avec un grand degré de résilience, ont transmis l’histoire des divers peuples amazighs de génération en génération sans relâche. On peut dire, sans exagération aucune, que la sauvegarde et la continuité de la civilisation amazighe est le résultat de la concomitance de deux facteurs essentiels :
Les connaissances traditionnelles, en tant qu’ensemble cumulatif de connaissances, de pratiques et de croyances, sont essentielles au maintien des traditions culturelles. Les femmesamazighes sont largement reconnues comme les gardiennes des connaissances traditionnelles (savoir et savoir-faire) liées à la gestion des ressources culturelles et naturelles.
Les femmes amazighes constituent l’épine dorsale des communautés autochtones de Tamazgha et jouent un rôle crucial dans la préservation et la transmission des connaissances traditionnelles ancestrales liées à l’alimentation et à l’agriculture ainsi que dans la protection de la biodiversité et des ressources naturelles.
En raison des tâches et des rôles qui leur sont assignés, les femmes amazighes ont développé des connaissances spécifiques sur les plantes. Les femmes sont des sélectionneuses de plantes, des gardiennes de semences, et cueillent des plantes à des fins médicinales, culinaires, de combustible, d’artisanat, de construction et de fourrage. L’utilisation, la gestion et la conservation des plantes se font au sein du foyer, ce qui rend ces connaissances invisibles et sous-évaluées par les personnes extérieures.
La maternité est hautement estimée par les Berbères, et les femmes incorporent des symboles et des couleurs liés à la fertilité dans leurs textiles, leurs vêtements, leurs tatouages, leurs bijoux et leurs coiffures, afin d’exprimer leur pouvoir.
Malgré les influences sociétales qui ont modifié la vie quotidienne des communautés berbères, les femmes continuent à produire et à utiliser des objets d’art inspirés de formes ancestrales, notamment lors des mariages ruraux, ce qui démontre le rôle crucial que jouent les femmes dans la préservation du patrimoine amazigh pour l’humanité et pour l’éternité.
Il va sans dire que le rôle crucial que les femmes amazighes jouent dans leurs communautés en tant que soutien de famille,gardiennes du savoir, leaders et défenseurs des droits de l’homme est sans limite. Les femmes amazighes sont des agents actifs du changement dans la société et des championnes de la durabilité. Elles sont aussi les gardiennes d’une accumulation collective de connaissances scientifiques et de compétences techniques liées à l’alimentation et à l’agriculture, à la santé et à la médecine, à la gestion des ressources naturelles, au changement climatique, à la langue, aux arts, à l’artisanat et aux pratiques spirituelles. Ces connaissances scientifiques ont un rôle clé à jouer dans la sauvegarde des écosystèmes et la garantie de la justice et de l’équité environnementales.
Vous pouvez suivre le Professeur Mohamed Chtatou sur Twitter : @Ayurinu

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