Challenges Économie
Par Challenges.fr le 06.07.2015 à 10h22, mis à jour le 06.07.2015 à 10h22 Lecture 5 min.
Les Grecs ont massivement dit non, dimanche 5 juillet, aux réformes et coupes budgétaires demandées par les créanciers d'Athènes en échange d'un nouveau renflouement. En attendant l'issue de ce vote, la BCE avait consenti à maintenir en coma artificiel les banques du pays au moyen de prêts d'urgence, les fameux ELA. La décision prise dimanche 28 juin de maintenir les prêts ELA, mais sans en augmenter le plafond, avait déjà tout d'un exercice d'équilibriste de la part des 25 banquiers centraux qui composent le conseil des gouverneurs de la BCE, son organe de décision. Ce lundi 6 juillet, tous les regards sont tournés vers la Banque centrale, qui, elle seule, peut éviter à l'économie grecque d'aller dans le mur, en violant ses règles. En revanche, si le pays n'est pas réapprovisionné en euros, il devra avoir recours à une monnaie parallèle pour payer factures, salaires et retraites. Explications.
Les conditions formelles d'octroi des prêts ELA sont prêtes à sauter: les banques, fermées depuis une semaine, sont au bord de l'insolvabilité et leurs garanties nécessaires pour emprunter auprès de la banque centrale s'amenuisent. Athènes sollicite néanmoins un relèvement du plafond des prêts ELA, seul moyen pour rouvrir les banques et éviter le "Grexit".
Le ministre des Finances français Michel Sapin en a appelé lundi matin à l'institution monétaire: le niveau des liquidités fournies aux banques grecques "ne peut pas être abaissé", a-t-il argué à la radio Europe 1. Tout en prenant soin de rappeler pour la forme "l'indépendance" de l'institution monétaire. "C'est encore à la BCE de faire le sale boulot", relevait de son côté Carsten Brzeski, économiste d'ING. Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker doit consulter dans la matinée par téléphone le président de l'Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem, le président du Conseil européen Donald Tusk et le patron de la BCE Mario Draghi. Celui-ci doit aussi présider dans la journée une réunion du conseil des gouverneurs.
Sans perspective d'accord rapide d'Athènes avec ses créanciers, alors que l'Allemagne trouve "difficilement imaginable" de nouvelles négociations, "la BCE n'a pas de base pour continuer à envoyer des euros à Athènes", relevait Holger Schmieding, de Berenberg.
En provenance de la première économie européenne, des voix se sont élevées dès dimanche réclamant une fin "immédiate" du soutien de la BCE aux banques.
Si le pays n'est pas réapprovisionné en euros, il devra avoir recours à une monnaie parallèle pour payer factures, salaires et retraites. Comment? En émettant des "IOU", sorte d'ersatz de monnaie temporaire. L'acronyme anglais "IOU" signifie littéralement "I Owe You": "Je te dois" ou "Je vous dois". Il s'agit ni plus ni moins d'une promesse écrite de paiement, d'une reconnaissance de dette émise par un débiteur qui, pour une raison ou une autre, n'a pas d'argent liquide.
Selon de nombreux économistes, le gouvernement pourrait alors imprimer ces titres, sorte de bons du Trésor mais qui ne sont pas assortis d'intérêts, en guise de salaires, de retraites, ou pour payer ses fournisseurs.
Le tout en attendant éventuellement de retrouver un accès à l'euro, ou de battre à nouveau monnaie, un processus très technique, très long et difficile logistiquement. Sous forme papier ou sous forme de certificats électroniques, plus ou moins sécurisés, les IOU pourraient être émis en parallèle des euros encore en circulation, et à parité avec le monnaie unique.
Dans un scénario imaginé par l'économiste Holger Schmieding de Berenberg Bank, critique très virulent du gouvernement emmené par la gauche radicale Syriza, l'Etat grec verse à un retraité touchant une pension de 500 euros par mois, un bon de 500 IOU. C'est ensuite que les choses se compliquent, si le retraité décide d'utiliser cet "argent" par exemple pour faire ses courses. Le commerçant, méfiant, peut refuser de reconnaître à ces IOU la même valeur que l'euro, et demander par exemple 50 IOU pour un panier de courses valant 30 euros.
"Une devise dans laquelle on n'a pas de confiance s'effondre dans une inflation galopante", prédit Holger Schmieding, pour qui le malheureux retraité se retrouverait avec une pension de 500 IOU ne valant plus que "100 ou 150 euros sur le marché noir, ou gris, ou je ne sais quoi". Loin de la valeur de départ en euros. Un scénario catastrophe inspiré de l'exemple du Venezuela, où la monnaie locale, le bolivar, n'en finit pas de plonger sur un marché noir où le dollar américain est roi.
Reste que les IOU ne peuvent être assimilés à une vraie devise, pilotée par une banque centrale indépendante, servant d'unité de compte.
Pour certains experts, ils pourraient cependant être utiles et faire office de monnaie parallèle transitoire, permettant à la Grèce de rester dans une zone grise, "où l'on ne sait si elle est dans ou hors de l'euro", écrivait un éditorialiste connu du Financial Times, Wolfgang Münchau.
Ces "IOU", par exemple garantis par les recettes fiscales futures, ne serviraient eux qu'à retrouver un peu de liquide pour les échanges quotidiens.
Dans un billet internet qui pourrait presque sembler prémonitoire, Yanis Varoufakis, ex-ministre des Finances grecque et également économiste, imaginait en février 2014, bien avant d'arriver au gouvernement, une sorte de "monnaie parallèle" pour les Etats de la zone euro.
Il expliquait les mécanismes permettant de créer une devise qui serait une "source de liquidité indépendante du marché", administrée "par les usagers", "n'impliquant pas les banques et (existant) en dehors de toutes les restrictions imposées par Bruxelles".
(Avec AFP)
Grèce Inflation Banque centrale Bons du Trésor Liquidité
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