© Damien Glez
L’activiste franco-béninois Kemi Seba, qui avait brûlé un billet de 5 000 francs CFA en 2017, doit se sentir plagié après avoir lui-même plagié le chanteur français pyromane Serge Gainsbourg, qui avait mis le feu à un billet de 500 francs en 1984. Ce mercredi, un incendie s’est déclaré dans l’imprimerie de la Banque de France de la ville de Chamalières, unité récemment centenaire qui enfante quelque 2,5 milliards de billets par an, notamment des francs CFA.
Après avoir débuté violemment à 10h15 dans un laboratoire de design de billets, le feu a été maîtrisé à la mi-journée par 70 pompiers. Si aucune des 387 personnes présentes sur le site n’a perdu la vie, 34 individus ont été légèrement blessés, dix ont été évacués au CHU, et quelques autres ont été incommodés par les fumées noires. Même si plusieurs rues du quartier ont été fermées à la circulation, le préfet du Puy-de-Dôme, Philippe Chopin, a tenu à rassurer : il n’y « avait pas de produits toxiques à l’endroit où le feu a pris ».
S’agirait-il d’un attentat d’activistes anticolonialistes ? Rien ne permet de le penser, l’imprimerie n’étant pas exclusivement consacrée à la production de francs CFA. Une enquête judiciaire est tout de même prévue. La « mise à feu » de documents administratifs sacralisés est devenue banale en France ces dernières années, des représentants du mouvement complotiste « One Nation » qui brûlent leur passeport aux antivax qui font flamber leur pass sanitaire.
Mais pas sûr qu’un tel incendie serve la cause des Africains de l’UEMOA ou de la CEMAC qui utilisent le franc CFA, soit 14 % de la population totale du continent. Si « l’outil global productif » de l’imprimerie de Chamalières n’a pas été touché, le sinistre « aura forcément une incidence » sur la production de billets, selon le directeur du site, Pierre-Yves Boissinot. Les internautes se demandent déjà si le nombre de billets de francs CFA disponibles sur le marché sera modifié dans les jours à venir et si des risques économiques sont encourus, censément déflationnistes.
Les groupies du CFA doivent se sentir assiégées à l’heure où les Français eux-mêmes n’utilisent plus de francs. Même si le terme existe en Suisse, en Guinée ou aux Comores, l’intitulé de la monnaie africaine sonne à ce point anachronique que ses gestionnaires s’étaient sentis obligés de changer le sens de l’acronyme : « franc des colonies françaises d’Afrique » devenu « franc de la Communauté financière africaine ».
Le franc CFA évoque davantage la dépression que le bling-bling
Déjà, dans un projet de loi de mai 2020, la France macronienne entérinait la fin de ce vestige qu’est le CFA, même si le futur eco devrait en conserver des caractéristiques comme la parité fixe avec l’euro. Et ce bien que le lancement de cette nouvelle monnaie commune aux quinze pays de la Cedeao ait été reporté de 2020 à 2027. Si l’on ajoute le spectre traumatique de la dévaluation de 1994 et le sentiment anti-français cultivé par un certain populisme ambiant, le franc CFA évoque davantage la dépression que le bling-bling.
Espérons que l’image de billets calcinés dans l’incendie de Chamalières n’inspirera pas de nouvelles versions de l’arnaque « wash-wash ». Il y a quelques années, des escrocs vendaient à prix d’or un produit « miracle » censé laver des billets de banque noircis.
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