Le président russe Vladimir Poutine le 28 mai 2014 au Kremlin à Moscou
afp.com/Mikhail Klimentyev
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“A perfect storm”. C’est l’expression qui circule en ce moment dans les milieux d’affaires pour qualifier la situation que traverse actuellement la Russie. Avec sa monnaie qui s’effondre, ses bourses qui craquent et ses taux d’intérêt qui explosent, la Russie est dans l’oeil d’un cyclone lancé par les Etats-Unis, l’Arabie Saoudite et les principaux pays européens. Ce mercredi, la Bourse de Moscou ouvrait encore en recul, de 3% environ. 
D’un côté, des sanctions financières imposées par les Etats-Unis et l’Europe à la suite du conflit en Crimée et en Ukraine. De l’autre, la baisse continue du prix du baril de pétrole, amorcée par le ralentissement économique mondial et confortée par le fort développement du pétrole de schiste américain. Une chute que l’Arabie Saoudite et Washington ont décidé d’accélérer pour affaiblir leurs rivaux respectifs: l’Iran pour le royaume saoudien, la Russie pour les Etats-Unis. C’est la conjonction de ces facteurs qui est en train d’asphyxier littéralement l’économie russe.  
Après avoir perdu 10% lundi par rapport à l’euro et au dollar, le rouble s’est affolé mardi perdant jusqu’à 20% avant de limiter les dégât sur une nouvelle baisse de près de 7%. Un euro s’échange aujourd’hui contre 86 roubles tandis que le dollar en vaut 70. Depuis le début de l’année, la monnaie russe a ainsi perdu 60% de sa valeur par rapport aux grandes devises occidentales.  
Ce mardi matin, Philippe Waechter, économiste en chef de Natixis Asset Management expliquait sur son blog que le phénomène que vit actuellement le pays était la conséquence directe de “la baisse du prix du pétrole, qui implique une baisse des recettes” au global pour l’Etat russe, très dépendant de l’or noir.  
Ce contexte faut peur aux investisseurs internationaux. Or “la fuite des investisseurs entraîne une baisse de la demande de monnaie nationale et un effondrement de son taux de change. Par ricochet, l’inflation grimpe fortement dans le pays”, explique à l’AFP l’économiste Charles Wyplosz, professeur à l’Institut de hautes études internationales de Genève. 
Le problème, c’est que la désaffection pour le rouble commence à gagner la Russie même. Dans certains commerces, des prix en dollar et/ou en euro ont fait leur apparition contre la volonté du gouvernement. Il faut dire que pour les ménages, les conséquences de l’affaiblissement de la monnaie nationale sont déjà très concrètes. La hausse des prix approche déjà 10% sur un an et promet de s’envoler encore. 
La banque centrale russse (BCR) est normalement la mieux placée pour défendre la valeur de la monnaie. Problème, elle paraît complètement impuissante. Après avoir injecté 5,9 milliards de dollars pour acheter des roubles, elle a augmenté lundi très significativement son taux d’intérêt de référence, passé de 10,5% à 17%. Et ce afin de rendre les placements en roubles plus attractifs. Une hausse aussi spectaculaire que peu efficace jusqu’ici. Et qui risque de peser sur la croissance en rendant les investissements très coûteux. 
“C’est une mesure destinée avant tout à bloquer des sorties de capitaux hors d’un pays”, explique Charles Wyplosz. En cas d’échec, il ne resterait plus que l’arme atomique de l’interdiction de la sortie de capitaux. Ce que le gouvernement exclut encore pour l’instant en assurant, ce mardi soir, avoir défini des mesures pour “stabiliser” le rouble. 
Bon nombre de spécialistes russes affichent ouvertement leur scepticisme. “Si on entre dans une spirale où on a l’impression que tout va mal et que l’économie s’effondre, aucune action de la banque centrale ne stabilisera la situation”, a jugé dans une tribune du quotidien des affaires,Vedomosti, Maxime Bouïev, professeur à la faculté d’économie de l’université européenne de Saint-Pétersbourg. “Le gouvernement doit proposer un plan clair de réformes”, a-t-il ajouté. 
Dans le cas contraire, si les choses n’évoluent pas rapidement, avec un baril de pétrole autour de 60 dollars, la Russie de Poutine pourrait connaître une année 2015 noire avec une prévision de chute de son PIB de l’ordre de 4,5%! Ce qui fait dire à un éditorialiste britannique du Guardian que le pays “vient de perdre la guerre économique avec l’Occident”. 
 
 
 
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