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Dans le comput oraculaire des deux auteurs (qui n’a pu être concerté, le mage d’Aix-en-Provence étant mort en 1566, 29 ans avant la publication du Malachie), le décompte des papes depuis 1917 comprendrait donc les cinq premiers nommés, de Benoît XV à Paul VI ; puis donnerait conjointement le rang de sixième aux deux Jean-Paul pour laisser en septième et huitième place – les dernières du temps présent – nos papes Benoît XVI et François.
C’est là qu’il faut scruter, avec prudence, car les choses sont loin d’être accomplies les concernant, le quatrain 0769 :
Aupres du ieune le vieux ange baisser,
Et le viendra surmonter à la fin :
Dix ans esgaux aux plus vieux rabaisser,
De trois deux l’vn huictiesme seraphin.
Aupres du ieune le vieux ange baisser, /Et le viendra surmonter à la fin. A Benoît XV, prénommé Giovanni Baptista, serait appliquée ici la parole de Jean-Baptiste à propos de Jésus : il faut que l’un augmente, et l’autre diminue (Jn 3, 30). C’est assez dire combien, en ce cycle issu de 1917 et jusqu’à la « fin », nous sommes dans une transition où se chevauchent l’avant et l’après, l’ancien et le nouveau. Il apparaît clairement que Benoît (XV ou XVI), vieux ange ou « vieil âge », cédant le trône à François le jeune mais restant auprès de lui, « dans l’enclos de saint Pierre », se baisse en quelque sorte pour lui faire place. Mais que conclure du second vers ? Serait-ce qu’à son tour, François s’effacerait – par la mort ? – et que Benoît survive, pour le surmonter à la fin ? Mystère.
Joseph Ratzinger, intronisé Benoît XVI, a choisi le nom de Benoît, saint patron de l’Europe et de la vie monastique, mais aussi par référence à son prédécesseur Benoît XV, Religio depopulata, qui, comme nous l’avons vu, ouvre en 1917 le cycle dont il s’agit. Les deux Benoît auront été, au milieu de troubles analogues au début de chaque siècle, des sortes de charnières. Ainsi, dans les entretiens avec le journaliste Peter Seewald[1], à la question « …vous considérez-vous comme le dernier représentant d’une époque ancienne ou comme le premier d’une nouvelle ? » notre pape émérite répond : « Je me situerais plutôt entre les temps. »
Est-ce à dire que l’un ouvre le cycle de transition et l’autre le clôt ? C’est ce que laisserait entendre à la fin. Notre Benoît a régné autant que son prédécesseur : huit ans, nombre solaire, et sa devise selon Malachie est De labore solis – « Du labeur du soleil ». Quant au labeur,– le travail, l’œuvre, l’ouvrage, il l’évoquait non sans humour en 2005, il ne le « récuse pas » : « Laborem non recuso ! ». Et à l’heure de se retirer, il a dit : « Saint Benoît, dont je porte le nom comme pape, me sera d’un grand exemple en cela. Il nous a montré le chemin d’une vie qui, active ou passive, appartient totalement à l’œuvre de Dieu ». Enfin, – ce trait lui a valu une particulière estime de son éditeur – l’humilité de la devise qu’il s’est donnée, où le travail (Arbeit) prend sa plus haute dimension : “Mitarbeiter der Wahrheit” : « Collaborateur de la Vérité »[2].
Dix ans esgaux aux plus vieux rabaisser : Ce vers a un aspect « comptable » auquel il faut faire droit, sans préjudice d’un sens encore à découvrir. Comptez dix ans pour chaque pape cité, soit 9 x 10 = 90. Si l’origine choisie est 1917, cela nous amène vers 2007, deux ans après l’élection de Benoît XVI. Leçon élémentaire. C’est la « fourchette » à l’intérieur de laquelle s’accomplissent les événements.
De trois deux l’vn huictiesme seraphin : voilà un emboîtage expert à lire phonétiquement : deux, trois, [de] deux l’un, 8ème séraphin, ou « sera fin »… La liste du quatrain précédent, à peine cryptée, est ici admirablement confirmée dans son rythme. Reprenons.
De[ux] : ces 2 premiers sont Benoît XV et Pie XI.
Trois : les 3 suivants, Pie XII, Jean XXIII et Paul VI.
De deux l’un : Jean-Paul I et II, dont il convient ici comme chez saint Malachie de ne faire qu’un.
La somme 2+3+1 nous menant à 6, Benoît XVI serait ici aussi le septième mais il n’est pas autrement indiqué par l’oracle et comme éludé – ce qui concorde avec cette notation dans l’Apocalypse : « quand il viendra, il doit demeurer peu… » [3].
En revanche, le huitième est fastueusement présenté.

Huictiesme seraphin. Devons-nous reconnaître en lui le pape actuel ? Certes, l’expression conviendrait à François sous la forme iconique, mystique, de seraphin dont nous tenterons d’ouvrir la dimension. Et même, ce serait un lien direct au patron qu’il s’est choisi, François d’Assise, que la tradition montre pieds, mains et flanc cloués par les rayons issus des plaies d’un séraphin, « serpent de feu du désert » aux trois paires d’ailes, alors que, retiré en Toscane sur le mont Alverne, le Crucifié lui infusait non seulement les plaies mais les clous de Sa Passion.
Mais il y aurait aussi le sens second auquel invite la lecture : huitième « sera fin » : le huitième sera la fin du cycle, l’octave de cette transition, de ce temps de bascule qui clôt le grand « Temps de l’Église ». Et ce sera la « dernière » fin avant la lointaine fin dernière, « Fin des fins » rejetée à l’horizon du jour-millénaire à venir, à laquelle présidera le dernier pape, Pierre le Romain. Nostradamus confirme donc encore l’énumération de Malachie : ce pape huitième, a vocation de clore, en ce temps, leur prophétie.
Avant de méditer la devise qu’il lui attribue – Gloria olivae – il faut lire ce que le poète réécrit avec force dans son quatrain 0048 :
Vingt ans du regne de la lune passés                                                                          
Sept mil ans autre tiendra sa monarchie:
Quand le soleil prendra ses iours lassés
Lors accomplir & mine ma prophetie.
Vingt ans du regne de la lune passés    
Sept mil ans autre tiendra sa monarchie:

Si le « règne de la lune » passé est, comme nous l’avons vu, à reconnaître dans celui des deux Jean-Paul – De medietate lunae. Leur « règne lunaire » est ici exactement nombré par les chiffres qui ouvrent chacun des deux premiers vers : Vingt et Sept, la durée du mois lunaire est aussi celle de leurs règnes cumulés : de 1978 à 2005, 27 ans : médiation de la Lune mystique et protection mariale que Jean-Paul II a extraordinairement éprouvées le 13 mai 1981, en rappel de Fatima (fatmah : femme musulmane et prénom de la seule descendante directe de Mahomet), sous les balles d’un « sujet du Croissant », Ali Agça.
Il reste à lire mil ans autre tiendra sa monarchie. Ce sera par référence à une autre dimension de l’eschatologie, celle de la « Grande Semaine » qui scande les Écritures : « N’oubliez pas, frères bien-aimés, qu’un seul jour du Seigneur vaut mille ans et mille ans ne sont pour lui qu’un seul jour[4] ». Osons dire simplement ces beaux mystères sur lesquels ont anticipé impatiemment jadis tant de millénaristes. Quatre « jours » de mille ans, comme le chante notre Noël populaire, auront précédé la naissance du Christ, tandis que nous autres disciples de Jésus sommes depuis deux « jours » (x 1000 ans) en pèlerinage de chrétienté.
Et voici l’aube du « septième jour » à venir – ce millénaire que l’Antéchrist – l’Autre – tente de disputer au Seigneur (annoncé déjà par le Tausendjäriger Reich des Nazis…). C’est la dernière « journée » de la présente humanité : et ce sont ces mille ans de Règne du Christ encore inimaginables, alors que nous l’implorons explicitement dans le Pater, et qui se concluront sous « Pierre le Romain » en un dernier combat apocalyptique.
Mais dans l’immédiat, le mage d’Aix en Provence vise le crépuscule où nous errons… Et pour preuve donne des faits qui parlent clairement aujourd’hui.
Quand le soleil prendra ses iours lassés
Lors accomplir & mine ma prophetie.

 Quand le soleil prendra ses iours lassés. Le soleil faiblissant, n’est-ce pas le crépuscule ? Et notre Benoît XVI De labore solis, n’était-il point lassé quand il a décidé de prendre sa retraite ? Et que dire de son nom Ratzinger, quand l’allemand ratzen veut dire ‘sommeiller, se reposer’ ? Premier d’entre les papes, après huit ans de règne, lui qui a vaillamment œuvré, choisit pour ‘s’éclipser’ le 28 février 2013 et conclut son œuvre par un livre solaire, Lumière du monde[5] ? Or il est dit ici que ce retrait inédit, inouï, de Benoît XVI, doit accomplir et [ter]mine[r] » ma prophétie.
Dés lors, son immédiat successeur, Huictiesme seraphin, « sera la fin ». Fin de l’ère de l’Église militante, peut-être celle de Pierre, et, sans qu’il nous soit donné de deviner à travers quelles convulsions de ce monde, introduction au millénaire suivant, « Jour du Seigneur ».
Luc de Goustine
Pape
Nom
Règne
Durée
Malachie
Interprétation courante
Nostradamus
0492

Ndms 0769
Ndms
0048

Benoît XV
Giovanni Baptista della Chiesa
1914-1922
8 ans
Religio depopulata
1ère  Guerre mondiale (1914-1918), grippe espagnole et révolution d’octobre dépeuplent la chrétienté.
 
 
 
 
 
 
Après le siege tenu dix-sept ans,
Cinq changeront en tel reuolu terme (60 ans) :
 
 
 
Deux
 
Pie XI
Achille Ratti
1922-1939
17 ans
Fides intrepida
Pape des missions et de l’action catholique, condamne le nazisme.
 
Pie XII
Eugenio Pacelli
1939-1958
19 ans
Pastor angelicus
Pasteur angélique, saint pape, appelé le « pape de Fatima »
 
 
 
 
Trois
 
Jean XXIII
Ange-Joseph Roncalli
1058-1963
5 ans
Pastor et nauta
(Cervus Siren ?)
Patriarche de Venise, ville des navigateurs. Pasteur de la grande étape du Concile Vatican II.
 
Paul VI
Giovanni Battista Montini
1963-1978
15 ans
Flos florum
Le lys, « fleur des fleurs », est trois fois sur ses armes. Apôtre de la collégialité.
 
Jean-Paul 1er
Albino Luciani
1978
33 jours
 
 
De
medietate lunae

L’un (« blanche lumière ») n’a régné qu’une lune. L’autre autant d’années que de jours dans un mois lunaire.
 
Puis sera l’vn esleu de mesme temps,
Qui des Romains ne sera trop conforme
 
 
 
Ces deux ne font qu’un
 
 
Vingt
[Sept] ans du regne
de la lune passés

Jean-Paul II
Karol Wojtyla
1978-2005
27 ans
A mis son pontificat de grand voyageur sous le signe de la Lune mystique, Mère de Dieu.
Benoît XVI
Joseph Ratzinger
2005-2013
8 ans
De labore solis
A régné 8 ans ; l’étoile à 8 branches ou escarboucle est symbole du soleil. Puis s’est retiré.
 
 
Quand le soleil
prendra ses iours lassés
François
Jorge Mario Bergoglio
13.03.2013-
 
Gloria olivae
Signe de paix ; agonie au Jardin des Oliviers, symbole d’Israël.
Séraphin de st François.
 
8ème sera fin
Lors accomplir & [ter]mine ma prophetie
 
 
 
 
 
 
 
 
mil ans autre tiendra sa monarchie.
[1] Benoît XVI, Dernières conversations, Fayard, 2016, p. 262.
[2] Burkhard Menke, Mein Autor, der Papst.
[3] En dépit des difficultés d’interprétation, référons-nous ici au verset de l’Apocalypse de Jean 17.10 qui pourrait être à la source de ces énumérations de pontifes. Ici dénommés « têtes » ou « 7 montagnes sur lesquelles la Femme [l’Église ?] est assise, ce sont aussi sept rois : cinq sont tombés, l’un existe, l’autre n’est pas encore venu, et quand il viendra, il doit demeurer peu. Et la Bête qui était et n’est plus est elle-même un huitième [roi] ; et elle est des sept, et elle va à sa perte. ». L’actuel président français est le septième de la Ve République.
[4] 2 Pierre 8
[5] Entretien avec Peter Seewald, éd. Bayard, 2011, ISBN : 978-2-227-48246-3.
« Savoir par coeur n’est pas savoir : c’est tenir ce qu’on a donné en garde à sa mémoire. » Michel de Montaigne

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