le premier mois
sans engagement
Entré dans une crise constitutionnelle interne qui rejaillit sur ses relations avec le pape, l’Ordre souverain de Malte est une importante institution caritative et humanitaire de l’Église.
Lecture en 3 min.
L’Ordre de Malte en trois questions
Le pape François avec le grand maître de l’Ordre de Malte, Robert Matthew Festing, en juin 2016.
GABRIEL BOUYS/AFP
Fondé en 1048 à Jérusalem comme un ordre religieux laïc, l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem a d’abord une vocation hospitalière auprès des pèlerins de Terre sainte. À l’instar des Templiers (dont ils hériteront des biens en 1314) ils auront aussi une fonction militaire de protection des pèlerins et des États latins de Terre sainte.
Après les Croisades, l’Ordre se replie à Chypre (1251), puis Rhodes (1310) et, enfin, à Malte (1530), Charles Quint leur concédant la souveraineté de la petite île. Le grand maître de l’Ordre souverain militaire hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, de Rhodes et de Malte est d’ailleurs reconnu, en 1607, comme prince du Saint-Empire et, depuis 1630, jouit du même rang protocolaire que les cardinaux.
Chassé de Malte en 1798 par Napoléon Bonaparte – sans combattre : les chevaliers avaient promis de ne jamais porter les armes contre la France – l’Ordre installe définitivement son siège à Rome en 1834, y bénéficiant d’un statut extra-territorial. Il se recentre alors plus spécifiquement sur l’activité d’assistance sanitaire.
Sujet de droit international public, l’Ordre de Malte possède sa propre constitution, ses propres institutions et émet des passeports, des timbres et même une monnaie. Il entretient des relations diplomatiques avec 106 État (pas la France avec laquelle un accord de coopération a néanmoins été signé) et dispose d’un statut d’observateur à l’ONU.
Dirigé à Rome par le grand maître entouré de son conseil souverain, l’Ordre fonctionne à travers un réseau constitué de 12 prieurés et 47 associations nationales, développant à travers le monde une intense activité caritative.
Les 13 500 membres, 100 000 volontaires et 25 000 professionnels (médicaux et paramédicaux) de l’Ordre sont ainsi présents dans 120 pays, ayant une activité de premiers secours et d’ambulances dans 33 d’entre eux. Un de ses fleurons est ainsi l’hôpital de la Sainte-Famille de Bethléem, seule maternité de la ville natale de Jésus. C’est aussi lui qui assure l’assistance médicale pour les pèlerins au Vatican.
L’Ordre dispose également d’un corps d’urgence humanitaire, Malteser International, qui, fort d’un budget de 36 millions d’euros, se mobilise sur la plupart des catastrophes humanitaires dans le monde.
En France, l’Ordre de Malte gère de nombreux hôpitaux, cliniques et établissements de soins. Il y est fort de 1 800 salariés et 5 500 bénévoles, disposant d’un budget de 86 millions d’euros, dont 17 millions de dons du public.
Les membres de l’Ordre sont divisés en trois classes (profès, obédience ou laïc) suivant leur degré d’engagement religieux. Il n’est plus nécessaire d’être noble pour entrer dans l’Ordre.
La crise actuelle provient d’un différend entre le grand maître, le Britannique Fra’Matthew Festing, qui a reproché au baron Albrecht von Boeselager, son grand chancelier (ministre de l’intérieur et des affaires étrangères) la distribution de préservatifs en Birmanie par Malteser International à l’époque où il était grand hospitalier (ministre de la coopération humanitaire).
Soulignant que cette question avait déjà été réglée, le baron Albrecht von Boeselager a refusé de démissionner, ce que le grand maître a considéré comme un refus d’obéissance entraînant le renvoi du grand chancelier.
Présent au cours de cette conversation, le cardinal Raymond Burke, cardinal-patron de l’Ordre (c’est-à-dire représentant du pape auprès de l’Ordre) aurait appuyé la demande de démission, laissant entendre que c’était « la volonté du Saint-Siège ». Un échange de lettre entre le grand maître et le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État, souligne néanmoins que le pape n’a jamais voulu le renvoi de personne au sein de l’Ordre.
Une commission a été nommée par le pape pour faire la lumière sur cette affaire dans laquelle ni le rôle ni les motivations du cardinal Burke – opposant notoire au pape – n’ont été éclaircis.
Mais le grand maître, invoquant une nouvelle fois l’obéissance qu’ils lui doivent, a interdit aux membres de l’Ordre de collaborer avec cette commission.
Estimant que la décision de renvoyer son grand chancelier était une affaire interne à l’Ordre souverain (alors même qu’il avait invoqué le manquement à la promesse d’obéissance), le grand maître rejette fermement la compétence de la commission nommée par le pape, provoquant ainsi une crise inédite entre les deux plus petits États du monde.
Vous devez être connecté afin de pouvoir poster un commentaire
Déjà inscrit sur
la Croix ?
Pas encore
abonné ?
Malte : dernières actus
Assassinat de la journaliste Daphne Caruana Galizia : deux frères condamnés à 40 ans de prison
Malte : des médecins déposent un recours contre l’interdiction d’avorter
« They Blew Her Up », l’assassinat de Daphne Caruana Galizia au théâtre à Bruxelles
À Malte, le pape attendu sur la sensible question migratoire
À Malte, François met en garde les catholiques contre la tentation de « regarder en arrière »
Une cheville ouvrière féminine pour le voyage du pape à Malte
À Malte, le pape François fustige « l’agressivité puérile et destructrice qui nous menace »
Le pape François est arrivé à Malte malgré une vive douleur au genou
Malte : « La lutte contre la corruption un enjeu majeur pour l’Église et le monde »
En complément
Le cardinal Parolin annonce « un processus de rénovation » de l’Ordre de Malte

source

Catégorisé:

Étiqueté dans :