Des hampes de fougères démesurées qui grimpent jusqu’au plafond, des verrières de Jacques Gruber où transparaissent des branches de pins et des feuilles de ginkgo biloba, sans parler du mobilier en acajou de Louis Majorelle et de grands lustres en fer forgé de Daum, constellés de pâtes de verre et diffusant une douce lumière… Que pourrait-on choisir de mieux, comme entrée en matière, que le décor parfaitement préservé de la brasserie L’Excelsior, un fleuron de l’École de Nancy ? Quoi de plus surprenant pour un groupe corporate que de petit-déjeuner ou de déjeuner que ce temple dédié à la nature. Florence Dossmann, responsable de la communication de l’Office du tourisme, explique : “L’histoire de cette École commence au moment de l’annexion de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine par les Prussiens en 1871. Après la perte de Metz et de Strasbourg, Nancy demeure la seule grande ville française de l’Est. Les habitants des territoires annexés émigrent et beaucoup s’établissent ici, avant d’éventuellement regagner Paris. Du coup, la population de la ville double en une quarantaine d’années. Avec ce formidable développement économique, les industriels et les commerçants manifestent leur envie de vivre dans un cadre repensé, et surtout à la mode.” Les créateurs et les artisans lorrains vont alors leur offrir une architecture, du mobilier et des objets de décoration inspirés de la nature ; un mouvement artistique commun à toute l’Europe que l’on appelle Art nouveau.
Partout dans le centre de Nancy, on peut découvrir, en petits groupes, ces témoins d’une époque heureuse. Cela commence par la maison de l’imprimeur Albert Bergeret – un éditeur à succès de cartes postales illustrées – qui protège des ferronneries de Louis Majorelle, une magnifique verrière de Jacques Gruber, Rose et mouettes, mais aussi une cheminée d’Eugène Vallin et des peintures de Victor Prouvé. Autre maison estampillée “École de Nancy”, celle de Louis Majorelle, construite par l’architecte Henri Sauvage, avec comme temps forts une cheminée et la rampe de la terrasse en grès flammé d’Alexandre Bigot, des vitraux de Gruber et du mobilier réalisé par le propriétaire.
Lors d’un rallye, on peut suivre les traces de ce style foisonnant d’étape en étape. Comme cet arrêt surprenant dans une agence du Crédit Lyonnais de la rue Saint-Georges afin d’apercevoir l’immense verrière du hall avec une frise de clématites, œuvre de Gruber. Ou encore dans la pharmacie du Ginkgo, où la feuille de ginkgo biloba a été déclinée sur les meubles en bois, la mosaïque du sol et jusque sur les plaques de propreté des portes. Surprise toujours devant les algues de pierre de la maison Weissenburger, les ombelles en fer forgé du portail de l’immeuble Georges Biet ou les énormes fleurs de pavots sur les ferronneries de l’ancienne graineterie Génin. Même à la Chambre de commerce et d’industrie, lors de réunions, les participants peuvent laisser leur esprit divaguer quelques instants en admirant d’autres vitraux de Jacques Gruber.
L’Art nouveau, même s’il ne le dit pas explicitement, s’est inspiré du style XVIIIe, qu’il a digéré et réinterprété avec une certaine idée du paradis terrestre, en apprivoisant jusqu’aux pétales des fleurs prises pour modèles, la monnaie-du-pape par exemple, mais aussi l’ombelle de la berce du Caucase ou encore le chardon, ancien emblème des ducs de Lorraine. À Nancy, le style XVIIIe siècle a atteint son exubérance sur la place Stanislas, une agora royale en hommage à Louis XV, imaginée par Stanislas Leszczynski, l’ex-roi de Pologne devenu duc de Lorraine, et son architecte Emmanuel Héré.
Point de rassemblement de tous les Nancéiens, elle prend aux beaux jours des airs de piazza italienne avec ses terrasses qui s’étirent devant les bâtiments classiques. Entre eux, le fil rouge est un chapelet de grilles, un chef-d’œuvre du serrurier ferronnier Jean Lamour qui a mis l’excellence de son savoir-faire à créer des arabesques en fer forgé, rehaussées à la feuille d’or. Marianne Valois, guide conférencière, raconte : “Historiquement, Stanislas perd son royaume de Pologne en 1736. Le problème est qu’il est le père de Marie Leszczynska, l’épouse de Louis XV. Le roi de France, à force de tractations internationales, conseille au duc François-Étienne de Lorraine d’épouser l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, avec qui il aura seize enfants, dont Marie-Antoinette. Louis XV donne alors à son beau-père le duché qui, à sa mort, devra être rattaché à la France. Louis XV pense avoir bien placé ses pions vu l’âge déjà avancé de Stanislas. Mais l’ex-roi, très bon vivant, ne mourra qu’en 1766, à 88 ans. C’est pour cela qu’en 2016, Nancy fête les 250 ans de la réunion de la Lorraine au royaume de France.”
Après s’être arrêtés sur la place pour une traditionnelle pause-café, les groupes peuvent d’ailleurs participer à une manifestation organisée pour cet anniversaire. L’exposition “La Lorraine pour horizon” permet notamment de comprendre les relations entre le duché de Lorraine et la France au fil du temps. Mais d’autres événements, plus réguliers, animent le tourisme dans la ville, comme à l’été le spectacle de vidéo-projection “Rendez-vous place Stanislas” qui illumine les façades, suivi en octobre par un jardin éphémère, sur le thème cette année de “Stan, royal jardinier”. De fin novembre à début janvier, ce sont les festivités de la Saint-Nicolas, entre village de chalets proposant pains d’épice et autres spécialités comme les macarons ou les bergamotes, concerts, défilés, spectacles de rues.
Mathias Lucien Rapeaud, directeur général de Nancy Tourisme et Événements, explique : “Nancy, c’est un petit Paris. Il y a un opéra à l’Italienne, une compagnie de ballet, trois jardins remarquables, trois places classées à l’Unesco. Il y a une vraie force culturelle… Par exemple, pour de petits groupes, notre bureau peut organiser des visites apéritives ou insolites, combinant découverte d’un lieu rarement ouvert au public – les coulisses de l’opéra, la répétition du ballet, la terrasse de l’arc Héré, la porte de la Craffe, la bibliothèque Stanislas ou encore la dégustation d’un vin de Toul en toute convivialité. Nous avons aussi un port de plaisance d’où les groupes peuvent partir pour une balade en bateau, mais également déjeuner ou dîner sur une péniche.” Et d’ajouter “Presque tout est possible ! La diversité des activités permet de répondre à la majorité des attentes des professionnels. Entre originalité et exclusivité, nous pouvons proposer du golf, de l’aviron et même du cyclotourisme avec la boucle de la Moselle… Bien entendu, nous répondons aussi aux demandes ‘à la mode’ tels que les cours de cuisine, profiter de la forêt de Haye en gyropode, ou encore faire du karting! Sans oublier la Villa Majorelle qui va être prochainement restaurée.”
Place Stanislas, le musée des BeauxArts abrite, lui aussi, quelques belles références à l’Art nouveau. Michèle Thisse, chargée de communication, indique : “Le musée possède quelques peintures comme celles de Victor Prouvé, qui glorifient la famille et les valeurs républicaines, ou celles d’Émile Friant, racontant des scènes de la vie ordinaire avec un œil de photographe. Au sous-sol, nous avons déployé notre collection de verreries Daum. Jean Daum, notaire à Bitche, s’installe à Nancy après la guerre de 1870, puis rachète une verrerie appréciée par la bourgeoisie de l’époque. Son fils Auguste poursuit l’œuvre de son père tout en améliorant les techniques et les détails, et son frère Antonin, ingénieur sorti de Centrale, expérimente les propriétés de l’acide et apporte plus de couleurs grâce à la collaboration de verriers et de décorateurs. Cette nouvelle respiration artistique fait naître des collections remarquées. Daum est présent dans les Expositions universelles et la maison est consacrée dans le monde entier.”
À l’époque, d’autres artistes comme Émile Gallé, qui dirige un commerce de cristaux et de céramiques, testent des techniques inédites pour réaliser des formes inspirées de la flore. On retrouve beaucoup de ses verreries au musée de l’École de Nancy, un lieu à découvrir en groupe et qui héberge un jardin où se trouve un étonnant pavillon aquarium surmonté d’une ombrelle de verre. Véronique Beaudouin, responsable de la communication, relate : “C’est dans la maison de campagne d’Eugène Corbin, fondateur des Magasins Réunis, qu’ouvre en 1964 le musée de l’École de Nancy. Les critiques vont bon train. Quelle idée de remettre au goût du jour ce style un peu lourd et empesé ? Un journaliste du Figaro s’interroge même sur l’opportunité d’un musée consacré à un ‘art de cauchemar’. Pourtant il recèle des trésors, dont la salle à manger de Charles Masson, réalisée par Eugène Vallin avec des peintures de Victor Prouvé. Sont à retenir également le bureau aux Nénuphars d’Émile Gallé, la chambre à coucher de Louis Majorelle, des verreries de Daum ou des vitraux de Gruber”.
Après cette immersion totale dans cet univers végétal, fantasmé par des créateurs avant-gardistes, retour à l’histoire de la région. A une trentaine de kilomètres de Nancy, à Lunéville, les groupes peuvent découvrir le château, surnommé le petit Versailles lorrain ou le château des Lumières. Ce bâtiment, résidence des ducs de Lorraine a été agrandi et embelli par Stanislas Leszczynski, mais a subi un incendie dévastateur en 2003. Depuis, on peut découvrir des expositions temporaires et faire des promenades entre un jardin à la Française et le parc des Bosquets, où, comme l’ont exprimé avec talent tous ces artistes, la nature a toujours su reprendre tous ses droits.
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