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Dans leur évaluation annuelle publiée ce mercredi, la Banque nationale tchèque (CNB) et le ministère des Finances de la République tchèque ont ce mercredi une nouvelle fois  recommandé de ne pas fixer de date pour l’adoption de l’euro. Ce n’est pas une surprise. Certes, Prague remplit une bonne partie des critères de Maastricht qui lui permettrait d’entrer dans la zone euro. Le déficit budgétaire est supérieur à 3 % du PIB, mais la politique d’austérité menée par le précédent gouvernement et qui sera poursuivie par son successeur qui vient d’être formé devrait permettre de rentrer dans les clous.
En théorie, les Traités européens devraient conduire le pays a adopter la monnaie unique à partir de 2015. Mais la République tchèque a de bonnes raisons de ne pas entrer dans l’euro. D’abord, parce que la population y est largement opposée. Ce n’est certes pas une raison suffisante puisque en entrant dans l’UE, Prague s’est engagée à adopter à terme l’euro. Et la Lettonie, qui va adopter l’euro au 1er janvier le fera sans l’appui de sa population, qui y est très majoritairement opposée. Mais surtout, parce que Prague a décidé depuis le 4 novembre d’utiliser l’arme monétaire pour lutter contre la récession et le risque de déflation.
La CNB a en effet décidé d’avancer là où la BCE s’est, pour le moment, arrêtée. Le 7 novembre, la banque centrale tchèque a prévenu qu’elle interviendrait « autant que nécessaire » pour ramener le cours de change à 27 couronnes par euro. La veille de cette intervention, il fallait 25,8 couronnes pour un euro. Le 8 octobre, la couronne tchèque avait atteint un plus haut de sept mois face à la monnaie unique à 25,5 couronnes pour un euro. Le nouveau cours pivot de la CNB représentait donc une dépréciation de 6 % par rapport au 8 octobre.
Comme on pouvait s’y attendre, la détermination de la CNB a été rudement testée dans les premiers jours de novembre. Du 7 au 20, la banque centrale tchèque a ainsi mis sur le marché pas moins de 200 milliards de couronnes (7,5 milliards d’euros) pour tenir son cours pivot. Il semble qu’elle ait gagné une première manche. Mardi, la monnaie tchèque a encore perdu du terrain face à l’euro, alors que la CNB répétait sa détermination au moins jusqu’en 2015. Ce mercredi, il fallait 27,7 couronnes pour un euro, soit 8,7 % de plus par rapport au 8 octobre.
Avec cette action sur la monnaie, la CNB passe à la vitesse supérieure après avoir, de son propre aveu, « épuiser tous les moyens conventionnels » à sa disposition. Depuis l’automne 2012, le taux directeur tchèque se situe à 0,05 %, autrement dit, le refinancement auprès de la CNB est gratuit. Cette dernière a également eu recours au « forward guidance » comme la BCE. Mais rien n’y fait. La situation économique du pays reste préoccupante.
Alors que la Hongrie ou la Pologne ont vu leur croissance accélérer au troisième trimestre, le PIB de la République tchèque s’est à nouveau contracté de 0,5 %. L’investissement et les exportations sont particulièrement touchés mais, globalement, le pays manque de moteur de croissance. Ce chiffre est assez préoccupant dans la mesure où il prouve que les produits tchèques n’ont pas profité de la petite croissance en zone euro et singulièrement en Allemagne, le premier client du pays.
Parallèlement, la demande de crédits des entreprises non financières et des ménages s’est affaissée au troisième trimestre, tandis que les prix, eux, commençait à frôler la zone négative. « L’inflation n’est soutenue que par les prix administrés, la hausse des taxes et les produits alimentaires », explique la CNB qui prévient que ces facteurs ne pourront plus jouer à partir de janvier. Déjà en octobre, l’indice des prix à la consommation en calcul national hors énergie et alimentation a reculé de 0,04 %. L’économie tchèque est donc menacée de déflation.
Comprimée par la politique d’austérité du gouvernement, la consommation des ménages se compriment (-0,1 % au troisième trimestre et -0,2 % au deuxième trimestre), sans que cela ne produise de véritables effets sur la compétitivité externe du pays. D’où la décision de la CNB de compenser l’austérité par une arme non-conventionnelle : la dépréciation de la monnaie. La banque centrale espère ainsi à la fois renchérir les importations et favoriser la compétitivité externe des entreprises tchèques afin de favoriser une reprise de la demande interne.
Reste à savoir si cette dépréciation somme toute encore modeste sera suffisante à redonner de l’oxygène à l’économie tchèque. La CNB marche sur des œufs dans un pays où la dévaluation n’est guère goûté et où la culture économique est proche de l’Allemagne. La banque centrale a, du reste, réservé un espace sur son site Internet consacré à l’affaiblissement de la couronne pour expliquer sa politique et « combattre les idées reçues » sur l’arme monétaire. Mais il lui sera difficile de justifier une politique plus aggressive.
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