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Une caserne vient d’être découverte sur une portion du Mur de l’Atlantique. Les soldats qu’elle hébergeait étaient au service de l’armée… romaine.
Fortifié dès l’Âge de Bronze, le mont Castel domine le port antique de Bayeux : Port-en-Bessin-Huppain.
Cent trous de pilleurs dans 500 mètres carrés… Telle la cavalerie, l’équipe d’archéologues qui fouille le mont Castel, dominant Port-en-Bessin-Huppain, dans le Calvados (Normandie), est arrivée juste à temps pour sauver l’information archéologique. Et qu’a-t-elle découvert ? Qu’après la guerre des Gaules, une unité de cavalerie romaine y fut stationnée.
Le débarquement en Normandie fut une chance pour la France, mais un malheur pour l’archéologie : les soldats des Alliés ont apporté avec eux des détecteurs de mines portatifs. Depuis, des milliers de chercheurs de trésor amateurs se promènent avec ces « poêles à frire » sur les chemins de France – au mépris de la loi. Ils prétendent rechercher des bijoux égarés ou des effets militaires abandonnés lors des derniers conflits. Mais quand ils tombent sur un gisement archéologique, ils ne dédaignent pas le fouiller à coups de bêche, laissant derrière eux un massacre d’indices scientifiques.
C’est ainsi que quand ils ont commencé à explorer le mont Castel, Anthony Lefort et Cyril Marcigny, de l’Inrap, ont pris sur le fait un de ces « détectoristes ». Ils l’ont convaincu de leur montrer sa collection. Quelle n’a pas alors été leur surprise de découvrir des oboles de Marseille, des quinaires séquanes ou d’autres cités gauloises, des potins, etc., bref, des monnaies provenant de toute la Gaule du Ier siècle avant notre ère !
Comme le site se trouve sur le territoire de la cité gauloise des Baïocasses, à qui la ville de Bayeux doit son nom, les archéologues ont d’abord pensé que le chercheur de trésors leur montrait en réalité une collection rassemblée dans la France entière. Toutefois, les fouilles ont vite confirmé la sincérité du détectoriste. Mont Castel signifiant « montagne château » en vieux français, les archéologues ont commencé par chercher les traces d’une ancienne forteresse. Une tranchée en travers du bord abrupt du Mont Castel a révélé que le petit plateau a en effet été fortifié trois fois : au-dessus des fondations d’un rempart implanté à l’Âge du Bronze (1350 – 800 avant notre ère) se trouvent celles d’un deuxième mur construit à la Tène ancienne (460 à 260 avant notre ère), lui même surmonté d’un troisième mur édifié pendant l’époque gauloise tardive (soit après la fin de la guerre des Gaules, en 52 avant notre ère). Ce dernier rempart était plutôt imposant : devant des fondations larges de plus de six mètres construites par remplissage entre deux murets de pierres sèches, des escaliers de pierre sèches ont été bâtis pour renforcer la structure.

Pourtant, à moins de deux kilomètres à vol d’oiseau se trouve l’oppidum (forteresse gauloise) du mont Cavalier, lui aussi fortifié pour la première fois à l’Âge du Bronze et, semble-t-il, utilisé à l’Âge du Fer. Pourquoi tant de forteresses sur un si petit territoire ? L’explication la plus logique est qu’elles protégeaient quelque chose d’important. Mais quoi ? Le port d’une cité gauloise semble une explication d’autant plus plausible que Port-en-Bessin-Huppain, qui n’est aujourd’hui qu’un petit port, était, selon certaines sources médiévales, le port de Bayeux à l’époque normande.
Ainsi, le mont Castel aurait protégé un port gaulois plutôt important, prédécesseur d’un port gallo-romain, puis du port normand. Où se trouve-t-il ? Pour le savoir, il faudra sans doute fouiller le fond marin, car la côte a reculé depuis l’Antiquité. Les repères des fortifications allemandes de la Seconde Guerre mondiale suggèrent que la mer a avancé de 25 mètres depuis 1945, et donc que le port gaulois puis romain pourrait se trouver à plus de 600 mètres du rivage.
Après cette première exploration, les archéologues ont sondé le plateau en deux endroits distants de 200 mètres choisis d’après les indications du détectoriste. Ils ont alors eu la surprise de trouver un échantillon varié de monnaies gauloises et romaines, comparable à la collection que le chercheur de trésors leur avait montré. Ces monnaies issues de plusieurs régions des Gaules se trouvaientdans les limites de ce qui s’est révélé être un casernement militaire. Reconnaissables aux trous des poteaux de fondation, les bâtiments identifiés sont parfaitement rectangulaires et disposés les uns par rapport aux autres suivant un plan géométrique… un genre d’urbanisme qui trahit les ingénieurs romains. La découverte de restes d’armement romain a achevé de convaincre les archéologues qu’une unité militaire romaine a été cantonnée sur le mont Castel. Parmi ces restes, une balle de fronde en plomb du même type que celles trouvées à Alésia et une pointe de scorpion (une sorte de baliste) prouvent que des artilleurs romains sont passés par là. Des clous de semelles de caligae, ces sandales en cuir typiques du soldat romain, confirment de façon définitive la présence de troupes romaines.
Un détail – la découverte de reste d’éperons – suggère par ailleurs que la caserne du mont Castel a pu être celle d’une ala gauloise, c’est-à-dire d’une « aile de cavalerie » auxiliaire. Ce type d’unité était en général recrutée au sein des peuples cavaliers soumis par les Romains. En temps de paix armée, elles avaient l’avantage de pouvoir se déplacer vite pour… maintenir la paix. Dans les années agitées qui ont suivi la victoire d’Alésia, les Romains ont en effet maintenu des légions en Gaule pour stabiliser la situation et se sont aussi servi d’auxiliaires gaulois, qui connaissaient le terrain, pour effectuer des interventions de police. À ce titre, les cavaliers avaient l’avantage de pouvoir intervenir rapidement.
Or une découverte faite par ailleurs en Moselle suggère que les Romains payaient souvent leurs auxiliaires avec un mélange de monnaies gauloises. En effet, une équipe de l’Inrap conduite par Jean-Denis Lafitte a découvert que peu après la guerre des Gaules, un chef de milice gauloise de la cité des Médiomatriques a caché un trésor dans sa ferme de Bassing, en Moselle. Nous ignorons pourquoi ce « collaborateur » n’est jamais venu récupérer sa récompense, mais c’est une aubaine pour les archéologues qui peuvent aujourd’hui analyser sa composition. Les pièces de monnaies qui forment le trésor de Bassing proviennent aussi de toute la Gaule.
Sont-elles le fruit de prises de guerre ou du prélèvement de taxes ? Nous l’ignorons, mais il est clair que les Romains se payaient sur le sanglier gaulois : ils faisaient financer par la Gaule sa propre pacification. Deux millénaires plus tard, les Allemands ne feront pas autrement lorsqu’il obligeront la France a fournir à elle seule jusqu’à un tiers de leur effort de guerre. Et les détectoristes devraient se méfier : au contraire des soldats romains, les soldats allemands n’ont pas abandonné sur le mur de l’Atlantique que des armes inoffensives.
Le « pop ! » d’une bouteille de champagne qu’on débouche n’a pas grand-chose en commun avec le « bang ! » produit par un avion de chasse dépassant la vitesse du son. Et pourtant ! Le gaz qui expulse loin le bouchon s’échappe avec une vitesse supersonique, quelle que soit la température de la bouteille. La preuve… en images.
À quoi est dû le « double bang » qu’on entend lorsqu’un avion franchit la vitesse du son ? Mieux comprendre ce phénomène permet d’en réduire les nuisances et d’optimiser les trajets des avions.
La hausse du niveau marin est une des nombreuses conséquences du dérèglement climatique lié aux émissions de gaz à effet de serre. L’ampleur du phénomène dépend de notre capacité à réagir
L'empreinte gauloise dans la France du XXIe siècle est discrète, mais omniprésente. On la décèle essentiellement dans l'existence d'un réseau routier et dans les noms des régions, villes, villages et lieux-dits.
Les murs antiques ont gardé les traces ténues de la vie quotidienne des Romains. Simples graffitis ou peintures soignées, ces témoignages spontanés parlent d’amour, de sexe, de commerce, des dieux, de chasse…
Le chef d’une troupe d’auxiliaires gaulois de l’armée romaine avait caché la solde prévue pour sa troupe. On a retrouvé ce trésor, qui en dit long sur les rapports qui prévalaient avec les légions romaines.

Ces quinaires en argent gaulois ont été émis par Marseille, par les Séquanes (Besançon) et par les Turons (Tours). Ce type de monnaies était typique des cités gauloises du Ier siècle avant notre ère.

Cette pointe de flèche de scorpion témoigne du passage d’artilleurs romains par le mont Castel. Plus habituelle, une balle de fronde du même type que celles trouvées à Alésia.

François Savatier est rédacteur à Pour la Science, et auteur du blog Bafouilles archéologiques.
F. Savatier, Le trésor d’un collaborateur gaulois, www.pourlascience.fr, 2012.
Yann Le Bohec, La redoutable efficacité des armements romains, Pour la Science n° 364, 2008.
F. Savatier, Maille à partir avec les Germains, www.pourlascience.fr, 2013.
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