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Source : JT 20h Semaine
Un coup d'épée dans l'eau ? Début mai, l'Union Européenne a fait part de sa volonté d'adopter un sixième paquet de sanctions contre Moscou, en réponse à l'invasion de l'Ukraine. "Il s’agira [notamment] d’un embargo total sur l’ensemble du pétrole russe, livré par voie maritime ou via des oléoducs, brut ou raffiné", avait alors précisé la présidente de la Commission, Ursula Van Der Leyen. La logique derrière cette mesure étant de "maximiser la pression sur la Russie", et d’autre part, "minimiser les dommages collatéraux" sur les économies du vieux continent.
Seulement voilà, trois semaines après ces annonces, l'embargo tant espéré par les Ukrainiens n'a toujours pas été entériné. Face à la passivité occidentale, Volodymyr Zelensky a d'ailleurs remis une pièce dans la machine ce lundi, lors du forum de Davos. "Il ne devrait y avoir aucun commerce avec la Russie", a-t-il martelé. "Nous comprenons que l'Europe essaye d'estimer le coût que cela va avoir pour son économie. Mais de l'autre côté, il y a l'Ukraine, il y a une vraie guerre", a insisté la ministre ukrainienne de l'Économie, Ioulia Svyrydenko.
"Il n'y a plus que quelques États, surtout la Hongrie, qui ont signalé des problèmes", a rassuré quelques heures plus tard Robert Habeck. Mais "les discussions se poursuivent" et "je pense que nous allons réussir une percée d'ici à quelques jours", a précisé le ministre allemand de l'Économie. "Un embargo est à portée de main", espère-t-il. "Il y a encore la possibilité dans les jours qui viennent de débloquer le veto hongrois", a également affirmé l'exécutif français, notant que "différentes options sont sur la table pour sortir de ce blocage". De son côté, Viktor Orban a estimé, dans une lettre au président du Conseil européen Charles Michel, "très improbable" un accord dans les prochains jours. "Discuter du paquet de sanctions entre les dirigeants, en l'absence de consensus, serait contre-productif", a-t-il glissé. Mais alors, qu'est-ce qui continue de bloquer ?
Le projet soumis par la Commission propose un arrêt des importations dans l'UE du pétrole brut et des produits raffinés d'ici à la fin de l'année 2022. Il prévoit, par ailleurs, l'interdiction d'assurer les bateaux transportant du pétrole russe. Contrairement aux cinq vagues précédentes de sanctions, les États membres éprouvent des difficultés réelles à parvenir à l'unanimité nécessaire.
Pour autant, ils sont, dans une grande majorité, parvenus à s'accorder sur un texte. Tous sauf un, ou presque. La Hongrie, sans accès à la mer, se montre en effet particulièrement véhémente sur la question. Un embargo ferait l'effet d'une "bombe nucléaire économique" sur le pays, largement dépendant de la Russie, a affirmé Viktor Orban. Selon le Premier ministre, cinq ans et des investissements en milliards de forints, la monnaie nationale, seront nécessaires pour transformer les raffineries reliées au précieux oléoduc Droujba. Soit un délai bien plus important que celui que propose l'Europe.
Surtout, ce véto est une manière pour le dirigeant, réputé proche de Vladimir Poutine, de faire pression sur les instances européennes avec lesquelles il est en conflit. Soupçonné de corruption dans l’usage des subsides européens, son gouvernement est dans le viseur de la Commission. C’est pour cette raison qu'elle refuse de lui verser les 7,5 milliards d’euros prévus dans le cadre du fonds de relance post-covid-19. Une procédure qui, à terme pourrait priver la Hongrie des autres fonds communautaires, a même récemment été déclenchée. C'est donc (aussi) une façon pour Budapest de reprendre la main.
En parallèle, une poignée d'autres pays ont demandé des dérogations, ralentissant les négociations. Outre la Hongrie, la Slovaquie – également totalement enclavée – a obtenu de pouvoir continuer ses importations pétrolières russes, via Droujba, durant l'année 2023. Ce délai a aussi été proposé à la République Tchèque, dans une situation similaire. Mais l'équilibre est fragile, la Pologne, les pays Baltes et d'autres, très hostiles au Kremlin, ne veulent pas de sanctions trop amoindries.
Pour ne rien arranger, Chypre, Malte et la Grèce tentent de défendre leur propre paroisse. Leurs puissants armateurs se montrent, notamment, particulièrement circonspects à l'idée d'interdire tout transport de produits pétroliers russes par des navires battant pavillon de l’UE. Les trois pays craignent de devoir faire face à des conséquences très néfastes sur leurs industries de transport maritime.
En l'absence de progrès cette semaine, la question de l'embargo devrait s'inviter au sommet européen des 30-31 mai.
En théorie, les Vingt-Sept peuvent parfaitement se passer du pétrole russe, qui ne pèse que 30 % du brut et 15 % des produits raffinés dans l'UE. Au contraire, les exportations de pétrole rapportent 80 milliards de dollars par an – dont environ 25% pour la seule Union Européenne – à la Russie, soit quatre fois plus que ses exportations de gaz.
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