Challenges Automobile Essais
Par Eric Bergerolle le 19.02.2019 à 08h12 Lecture 8 min.
ESSAI. Son image inoxydable permettait à la BMW Série 3 de conserver la tête des ventes. Mais à dire vrai, les amateurs ne prenaient plus autant de plaisir à son volant. Le sursaut salutaire intervient avec cette septième génération.
L’Alfa Romeo Giulia avait mis en lumière combien la direction de la Série 3 avait perdu en vivacité et en sensations. La toute nouvelle mouture de la BMW corrige ce défaut, sans verser dans les excès qui rendent la tenue de cap de l’Italienne un peu trop nerveuse. Un compromis séduisant.
Les constructeurs coréens produisent des automobiles sûres, confortables et endurantes. Toutefois il leur aura fallu une quinzaine d’années pour le faire savoir au grand public. Maintenant que c’est chose faite, Hyundai et Kia aimeraient se forger une image moins pantouflarde et prouver leur capacité à mettre au point des voitures attachantes — pas seulement compétentes.
Pour ce faire, les Coréens ont débauché l’ancien patron de BMW M GmbH. A prix d’or. Voilà qui donne la mesure du prestige qui s’attache au savoir-faire du constructeur allemand, réputé pour ses châssis à l’équilibre sans égal.
Le résultat de ce transfert d’équipe ne s’est pas fait attendre, avec une paire de berlines propulsions — les Kia Stinger et Genesis G70 — qui ravivent chez l'amateur de conduite des sensations qu’il n’avait plus ressenties depuis longtemps au volant de sa BMW Série 3.
Là est l’ironie de l’histoire : au moment où ses rivaux se résignaient à appliquer ses préceptes, BMW choisissait de s’en écarter pour donner à sa Série 3 un comportement moins intimidant pour Monsieur Tout-le-Monde, histoire de ratisser plus large. L'image du modèle en a quelque peu souffert ; pas ses ventes, bien au contraire.
Le problème est que la concurrence n'est pas restée les bras croisés. Avec leurs roues arrière motrices, leur épure de suspension soignée, leur direction franche et une répartition à égalité de la charge entre leurs essieux, les Kia Stinger et Genesis G70 copient ouvertement la recette qui fit la réputation des Série 3. Elles ne sont pas les seules, loin s’en faut. A la suite de Lexus et d’Infiniti, Cadillac et Alfa Romeo sont revenus à leur tour à la formule de la propulsion et ont concocté des berlines qui comptent aujourd’hui parmi les plus enthousiasmantes à conduire. L’Italienne s’est même forgée la réputation d’être plus agile et plus affûtée que la Série 3. Sacrilège ou triste vérité ?
L’affaire relève des préférences et de la sensibilité de chacun mais force est de constater qu’un consensus s’est formé autour des deux dernières générations de la BMW Série 3 : il leur manque le fameux “toucher de route”, ce juste équilibre entre efficacité et confort, entre sportivité et stabilité qui arrache un sourire à l'amateur.
La sortie de l’Alfa Romeo Giulia, en particulier, a mis en lumière combien la direction de la Série 3 avait perdu en vivacité et en sensations. La toute nouvelle mouture de la BMW corrige ce défaut, sans verser dans les excès qui rendent la tenue de cap de l’Italienne un peu trop nerveuse. Un compromis séduisant.
Soucieuse d’épargner toute sueur froide au conducteur non initié, la Série 3 avait par ailleurs atténué la vivacité de son train arrière. Jusqu’à se montrer moins incisive qu’une Peugeot 508 en virage serré. La nouvelle Série 3 corrige le tir, même si l’efficacité prime encore sur les sensations. La Giulia s’inscrit plus vivement virage mais donne le sentiment d’une moindre stabilité dans les grandes courbes. Deux approches différentes.
Des progrès sont à noter également au chapitre de l’amortissement. Les deux générations précédentes de la Série 3 pâtissaient de leurs pneumatiques à roulage à plat (ou Runflat). Plus lourds, ils augmentent l’inertie de la roue et l’intensité des vibrations. En réaction, BMW avait choisi au milieu des années 2000 d’assouplir les ressorts de suspension, au détriment de la vivacité des réactions. Dans le même temps, l’amortissement avait été durci, afin de limiter la prise de roulis et les effets de pompage. Ce qui n’allait pas sans conséquence sur le confort des passagers. Bref, le délicieux compromis d’antan avait été sacrifié, un peu compensé par l'avènement de l'amortissement piloté. La plupart des clients n'en avaient que faire ; mais il devenait urgent pour BMW de réagir, ne serait-ce que pour éteindre le feu de la critique et redorer le blason de la Série 3.
Pour briser le cercle vicieux, la nouvelle BMW Série 3 (type G20) abaisse son centre de gravité (- 10 mm) et s’efforce de contenir sa masse, annoncée en baisse de 55 kg en moyenne, malgré un allongement de 8,5 cm. Elle rigidifie sa caisse (+ 25 %) et y boulonne des voies plus larges, suspendues à des ressorts 20 % plus fermes. Surtout, elle s’équipe d’amortisseurs inédits chez BMW, qui intègrent en leur extrémité un rétrécissement qui bride l’amplitude d’oscillation sur les grosses déformations de la chaussée. Ces éléments passifs ne fonctionnent qu’à la détente sur les amortisseurs avant ; qu’en compression à l’arrière. Par définition, ils sont incompatibles avec le système d’amortissement piloté proposé en option.
Le principe de fonctionnement de cet amortisseur-dans-l'amortisseur est très similaire à celui mis en œuvre sur les Citroën C4 Cactus et C5 Aircross. À ceci près que le constructeur français donne la priorité au confort et à l’effacement des ralentisseurs, quitte à induire davantage de roulis et de tangage que ce que BMW est prêt à tolérer.
La BMW Série 3 avait feint d'oublier que la sportivité est affaire d'équilibre, de toucher et de franchise dans les commandes. Au volant de la nouvelle mouture, le conducteur retrouve le plaisir de jouer de l’accélérateur pour corriger sa trajectoire en virage : c'est tout ce qui fait le sel d'une propulsion, face à des tractions toujours mieux affûtées.
Les remontées dans le volant sont moins nombreuses que dans le volant de la Giulia, mais la sérénité de conduite n’en est que meilleure : sur les petites routes, la Série 3 est moins fatigante. L’essentiel est sauf : on perçoit mieux le travail des pneumatiques, du fait d’une assistance électrique qui se durcit à mesure qu’augmente le taux de dérive, du moins en mode Sport. BMW souligne l'importance dans l’obtention de ce résultat de l’augmentation de l’angle de chasse des roues avant et de la densité des cales qui isolent le train avant de la caisse. La BMW 330i M Sport essayée (56.200 euros, hors options) était équipée de la direction à démultiplication variable DirectDrive (option gratuite) qui, de l'avis général, isole davantage le conducteur du ressenti de la route.
Le regret est inverse à propos des percussions au passage des saignées de la chaussée, rançon du châssis M Sport et des flancs rigides des pneumatiques de 19 pouces à roulage à plat. Le système d'amortissement piloté SelectDrive (650 euros) agit plus nettement dans le sens d'un raffermissement (mode Sport) que dans celui d'un assouplissement.
N'allez pas en conclure que la BMW Série 3 manque de raffinement. Il est évident dans son silence de marché — du moins sur cet exemplaire équipé du double vitrage aux portières avant (250 euros), et mû par le 4-cylindres essence turbo de 258 chevaux. Quelconque au démarrage, son timbre prend une tonalité plus sympathique lorsqu'on enfonce la touche Sport. Subtilité du système, ce n'est pas un son artificiel qui est diffusé via les hauts-parleurs mais bien un enregistrement des fréquences jugées les plus flatteuses à l'oreille.
Un peu de subtilité sera demandée aux passagers lorsqu'ils s'adresseront à l'assistant personnel, un ordinateur qui réagit à la voix et va de pair avec l'instrumentation tout-numérique répartie sur deux écrans de 12,3 et 10,3 pouces (1.650 euros). Il est recommandé de bien articuler et de s'en tenir à une liste de commandes-types, telles que "Bonjour BMW, règle la température à 21 degrés" ou "Bonjour BMW, où se situe la prochaine station essence ?". Alternativement, le conducteur impatient peut se risquer à prononcer un "Bonjour BMW, j'ai froid" qui sera suivi de la question : "Quelle température souhaitez-vous ?". Inutile de dire que la plupart préféreront tendre le bras et manipuler une commande directe. BMW promet que la communication n'en sera que meilleure au fil des mises à jour et des kilomètres, le temps pour cette "intelligence artificielle" de se familiariser avec les préférences du conducteur.
En retour, une marque de gratitude serait la bienvenue. Les ingénieurs de BMW y verraient un encouragement à tenir tête aux financiers qui suggèrent de construire la prochaine Série 3 non pas sur la base de sa grande sœur, la Série 5, mais sur celle — meilleure marché — des Série 1 et 2 à roues avant motrices. Qu'on se le dise : si la Série 3 est résolue à ne plus vivre sur sa seule réputation, elle compte sur l'entrain de son conducteur à défendre la formule de la propulsion.
Le constructeur allemand compte également sur l'épaisseur de son porte-monnaie. L'inflation des tarifs enregistrée est justifiée par le surcroît d'aisance offert aux places arrière, comme par l'allongement de la liste des équipements fournis d'office. Toutefois cela ne fait pas pour autant de la BMW Série 3 une familiale bon marché.
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