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L’e-dollar est un CBDC ou Central Bank Digital Currency (1), c’est-à-dire un dollar en cash mais pas sous format papier mais sous forme numérique. On y décèle d’abord un sens de l’urgence. Il faut que les Etats-Unis puissent participer de manière crédible aux discussions internationales relatives au CBDC. Sans projet d’e-dollar, c’est impossible. L’e-dollar servira aux transferts d’argent transfrontaliers notoirement trop chers et inefficaces. Ils doivent favoriser l’inclusion financière.
Le président Joe Biden charge son administration de lui fournir une vue sur les choix techniques possibles, le réel impact des CBDC pour promouvoir l’inclusion financière car trop d’Américains n’ont même pas de compte en banque : mais aussi les relations entre CBDC et les monnaies numériques privées qui, curieusement, ne sont pas ignorées ni dédaignées comme dans d’autres projets de CBDC ailleurs dans le monde.
L’ordre exécutif établit aussi un lien entre CBDC, monnaies privées et leur impact sur la démocratie, comme si ce droit régalien, battre monnaie, avait déjà eu une influence sur la bonne santé des démocraties.  Le président Biden s’inquiète aussi de savoir si les projets de CBDC à l’étranger ont le potentiel de disrupter les systèmes internationaux de paiement d’aujourd’hui dans un sens qui marginaliserait la centralité des Etats-Unis et du dollar. Il veut aussi savoir comment les CBDC pourraient influencer négativement le respect des sanctions contre des Etats, les crimes financiers, la sécurité nationale et le respect des droits de l’homme. Ce n’est pas parce qu’un CBDC est émis par une banque centrale, par définition, qu’il est plus sûr qu’une monnaie numérique privée (on ne parle même pas du bitcoin).
L’ordre présidentiel couvre aussi tous les actifs numériques et tous les accidents qu’ils peuvent occasionner : fraude accrue, fuite des données, pratiques abusives, incidents cyber, violation de la réglementation qui peuvent impacter tous les acteurs : consommateurs, investisseurs et entrepreneurs qui font tourner le système. Il se pose la question d’autre part de savoir ce qui peut mener à une adoption massive d’un actif numérique.
Là où le président voit fort juste, c’est que l’innovation financière technologique ne connait pas de frontière géographique et nécessitera donc une coopération internationale : il suffit que la supervision réglementaire dans un pays ne soit pas à la hauteur, pour permettre des arbitrages. Il suffit d’une juridiction où la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme ne soit pas à la hauteur non plus pour créer un trou noir dans la poursuite des flux d’argent illicites. Les Etats-Unis appellent en même temps de leurs vœux l’interopérabilité entre les systèmes de paiement actuels et les CBDC. Le président n’évoque toutefois pas l’interopérabilité entre CBDC, par exemple entre l’e-euro et l’e-dollar. Les Etats-Unis notent que même si les CBDC sont émis par les banques centrales, l’infrastructure pour mettre en route cette technologie sera forcément aux mains de participants publics et privés. Il ne s’agit pas, comme pour la monnaie papier, de simplement faire appel à un imprimeur de confiance !
Quelles sont l’infrastructure, les capacités et l’expertise à mettre en place dans les agences américaines pour supporter l’introduction des CBDC ? Chaque choix technique devrait être évalué par rapport aux technologies, en se projetant dans le futur, comme l’informatique quantique. Il faudra aussi redéfinir le rôle des agences chargées de faire respecter la loi pour détecter, investiguer et poursuivre les activités criminelles quand elles sont en relation avec les actifs numériques. Les conséquences des actifs numériques sur la concurrence seront aussi examinées. C’est sans doute une allusion à un acteur comme Facebook et son projet de monnaie numérique, le Libra, qui à l’échelle des 2 milliards d’utilisateurs de Facebook aurait pu faire la loi. Faut-il aussi renforcer la protection de la vie privée et celle du consommateur s’agissant du CBDC ? Des actifs numériques peuvent être pistés et peuvent servir à surveiller les gens surtout si l’infrastructure est confiée à des entreprises privées. Une salve est lancée, à côté des actifs numériques, contre les cryptomonnaies et leur impact sur l’environnement avec leur consommation d’énergie débridée. Bien sûr, l’impact des actifs numériques sur la stabilité financière et les trous dans la réglementation sera examiné.
Si le président américain s’inquiète, c’est que les chiffres qu’il rappelle font peur : début 2016, les actifs numériques de toutes sortes, non émis par les Etats ne représentaient que 16 milliards de dollars. En novembre 2021, on en est à 3.000 milliards. Il ne s’agit pas d’abolir les actifs numériques. Il faut des garde-fous qui protègent les consommateurs, les investisseurs, les entrepreneurs de ce type d’activité. Non seulement les mêmes régulations doivent s’appliquer : même business, même risques, même règles. Mais justement, des mesures réglementaires supplémentaires peuvent s’avérer nécessaires pour tenir compte de nouveaux risques apportés par les CBDC.
Cet ordre présidentiel se veut la coupole de tout ce qui a trait aux actifs numériques, pas uniquement les e-dollar. Il y a un côté unificateur qui pourrait faire la différence quand toutes les administrations auront fait rapport au président à la suite de cet ordre exécutif.
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Pour en savoir plus : Executive Order on Ensuring Responsible Development of Digital Assets, March 9, 2022

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