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Le rapport de l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA International), basé à Stockholm, en Suède, rendu public mercredi, est un nouveau coup dur pour Maurice sur la scène internationale.
Cette institution, une référence mondiale dans le domaine de la mesure de la démocratie, note que sept pays reculent en 2022. Parmi ceux-ci, Maurice figure en bonne place. Les autres sont le Brésil, El Salvador, la Hongrie, les États-Unis et l’Inde.
Ceci révèle, selon IDEA International, « à quel point il est commun pour des leaders élus d’utiliser leur pouvoir pour fragiliser des institutions démocratiques de l’intérieur et ceci indique la fragilité de la démocratie et le besoin de renforcer les institutions pour qu’elles puissent résister aux pressions, surtout en temps de crise ».
Sur le plan africain, huit pays ont connu « un déclin significatif sur les cinq dernières années ». Parmi, on retrouve Maurice, mais aussi le Benin, la République centrafricaine, les Comores, le Nigeria, le Tchad, la Guinée et le Mali.
Pour IDEA International, ces pays « qui font face à un déclin démocratique » ont en commun « une restriction de l’espace civique et la manipulation des élections et des limites des mandats pour servir les intérêts » de ceux au pouvoir. 
Par contre, des pays, comme la Gambie, sont montrés en exemple. La Gambie est « la principale ‘success story’ du continent ces cinq dernières années », car elle est parvenue à « améliorer drastiquement sa performance démocratique ». Le Niger et la Zambie sont les deux autres meilleurs élèves du continent.
Alors que Maurice est cité comme étant parmi ceux qui enregistrent le plus fort déclin, le rapport soutient que déjà la situation est mauvaise dans le monde en général. « La moitié des gouvernements démocratiques dans le monde subissent un déclin. Les obstacles qu’ils rencontrent vont des restrictions sur la liberté d’expression à la méfiance à l’égard de la légitimité des élections. Ce recul survient alors que les dirigeants élus font face à des défis sans précédent liés à la guerre menée par la Russie en Ukraine, aux crises du coût de la vie, à une récession mondiale imminente et aux changements climatiques. Le nombre de pays en recul – ceux qui connaissent la plus grave érosion démocratique – n’a jamais été aussi élevé », estime IDEA International.
Et d’ajouter dans ses conclusions que « le recul de la démocratie dans le monde comprend la remise en cause de résultats crédibles d’élections, les restrictions sur les libertés et les droits en ligne, le désintérêt des jeunes à l’égard des partis politiques et de leurs dirigeants isolés des réalités, la difficulté de lutter contre la corruption et la montée des partis d’extrême droite qui polarise les paysages politiques”.
En début de semaine, Reporters sans frontières (RSF) a émis un communiqué pour dénoncer les attaques contre les journalistes mauriciens et le cyberharcèlement dont font l’objet le directeur de l’information, Nawaz Noorbux, et les journalistes de la station privée Radio Plus, Jean-Luc Émile et Al-Khizr Ramdin, ainsi que le journaliste de la station de radio Top FM, Krish Kaunhye. « Il s’agit notamment d’attaques les présentant comme ayant des liens avec des trafiquants de stupéfiants – principalement sur trois comptes Facebook », avance RSF.
Cette dernière constate que « les relations entre les autorités et la presse sont devenues assez tendues » et que le gouvernement est perçu comme « le premier détracteur de la presse indépendante ».
À noter que Maurice est en recul constant au niveau du classement sur la liberté de la presse de RSF. Alors qu’elle était 56e en 2020, elle est maintenant à la 64e place. En 2007, Maurice était 25e.
En mars dernier, V-Dem Institute a, dans son rapport de février dernier, classé Maurice comme étant un pays autocratique. L’année d’avant, elle avait placé Maurice parmi les 10 pays en voie d’être autocratisés.
Rajen Bablee : « Désolant de voir notre pays dégringoler »
Le directeur exécutif de Transparency Mauritius, Rajen Bablee, indique qu’il est toujours désolant de voir notre pays dégringoler d’un classement, peu importe lequel. « On veut tous voir l’île Maurice prospérer et s’afficher comme un pays de droit, soutenu par une structure démocratique solide et transparente. Il est vrai que, dans plusieurs endroits du monde, la démocratie a reculé, surtout durant la pandémie de la COVID-19. Le rapport mentionne 10 pays qui ont reculé par rapport aux ‘clean elections’. Ces 10 pays sont Maurice, la Bolivie, le Botswana, le Brésil, la République tchèque, la Hongrie, l’Inde, la Namibie, la Pologne et les États-Unis », a-t-il affirmé. 
Rajen Bablee souligne que le rapport explique que l’étude prend en considération, entre autres, la capacité des institutions chargées de contrôler les élections, leur indépendance et leur capacité à fonctionner. « Après les élections de 2019, il y a eu plusieurs contestations par des candidats, dont certains ont demandé un recomptage ou alors ont demandé des invalidations en cour. Même si aucune n’a abouti jusqu’à présent, il demeure que la nouvelle de ces contestations a fait le tour du monde », fait-il comprendre.
Mais, d’autre part, Transparency Mauritius demande, depuis plusieurs années, que l’Electoral Supervisory Commission soit dotée de pouvoirs pour enquêter, notamment sur les dépenses des différents partis ou candidats. « L’article 41 de la Constitution mentionne que ces pouvoirs doivent être prescrits, mais plus de 50 ans après l’indépendance, rien n’a été fait dans ce sens. Une autre partie épineuse concerne le financement des partis politiques, un trou noir béant qui ouvre la porte à la corruption et le blanchiment » avance-t-il.
État voyou
L’observateur politique Faizal Jeerooburkhan n’est pas étonné par le rapport d’IDEA International avec la façon dont les choses se sont déroulées au pays ces derniers temps. « On voit que l’opinion des citoyens n’a aucun effet sur le gouvernement. De par la façon dont des décisions sont prises par le gouvernement, il était évident que la démocratie allait prendre du recul. La situation, au lieu de s’améliorer, se détériore. C’est triste pour le pays », dit-il. Il est, selon lui, malheureux que les institutions internationales pointent du doigt le pays. « C’est très mauvais pour l’image du pays sur le plan international. Dans une démocratie, les gens ont leur mot à dire, mais ici, une fois que les députés sont au Parlement, ils font ce qu’ils veulent », soupire-t-il.
Selon lui, cela peut avoir des répercussions économiques et commerciales, car « Maurice traite avec plusieurs pays européens pour lesquels la démocratie est un facteur important. Il se peut que les autres nous voient comme un État voyou », avance l’observateur politique.
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