En combi ou en train, sur la route des vacances. (Photo Nigel Roddis. Reuters)
Ça y est, le mois d’août est entamé. L’heure pour certains de reprendre le boulot, pour d’autres d’enfiler enfin le maillot, mais avant ça, il va falloir affronter les gares ou les aires d’autoroutes. Et, entre celui qui rentre «chez lui, là-haut vers le brouillard» et celle qui descend «dans le midi», comme disait Michel Fugain, la communication n’est pas toujours facile.

Début juillet, nous vous guidions dans les expressions des Sudistes. Voici maintenant celles du Nord, élargies à l’Est de la France et à la Belgique. Car, non, il ne suffit pas de connaître la fricandelle, hein, biloute, pour ne pas passer pour un chabert dans el’ch’nord. De la même manière, il vaut mieux être armé pour commander un petit pain à la boulangerie sans passer pour une quetsche en Alsace. Et si d’aventure, ce lexique (un peu pêle-mêle) était incomplet, les lecteurs ont meilleur temps de commenter pour nous dire quoi.
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Des frites belges. (Photo Francois Lenoir. Reuters)
Avoir difficile à

«Je me suis cassé le poignet, j’ai difficile à écrire» ou «j’ai dur à écrire». Belgicisme pour : «Avoir du mal à faire quelque chose, avoir des difficultés». Existe aussi : «Tu as facile à dessiner» pour «tu dessines bien, facilement».
Babache
(Nord) «C’est un babache» ou «c’est un chabert», qui signifie en ch’ti : «C’est un idiot».
Brun
(Nord) Dans le Nord, on dit «c’est du brun», quand les gens normaux parlent de matière fécale, pour signifier leur dégoût ou leur désapprobation (du vieux français «bran»).
Ça tire
(Est) Quand «ça tire !», c’est tout simplement qu’il y a un courant d’air.
C’est égal
(Alsace) Un raccourci bien pratique pour «ça m’est égal».
Chercher
(Alsace) Si vous entendez «je dois chercher le petit à la crèche», ce n’est pas que l’enfant s’est caché, c’est juste la version alsacienne de «aller chercher». On peut aussi chercher du pain par exemple.
Chicon
(Belgique) Le Belge qui vous invite à dîner (à midi, donc, cf plus bas) vous servira peut-être une «salade de chicons». Vous mangerez en fait une salade d’endives. Pour la préparer, il aura rincé les chicons et les aura séché avec un «essuie» (un torchon). A table, il aura posé à côté de votre assiette un pistolet. Ne vous inquiétez pas, il s’agit d’un petit pain de type pain au lait.
Chouille
(Lorraine) C’est un peu répandu, mais à l’origine, c’est lorrain : «Faire la chouille», c’est faire la fête.
Clancher
(Lorraine, Alsace) On «clanche» une porte pour la fermer (du mot «clanche», la poignée de la porte, variante régionale de «clenche»).
Comme dit
(Alsace) «Comme dit», calqué sur l’allemand «wie gesagt». Assez intraduisible mais omniprésent.
Cornet
(Lorraine) Un sac plastique, ou une poche, en Lorraine, c’est un «cornet».
Dîner
(Belgique) Si un Belge vous invite à dîner, attention de ne pas arriver vers 20 heures avec un bouquet de fleurs ou une bouteille : il vous attendait en fait à 13 heures. En Belgique, on déjeune le matin, on dîne à midi et on soupe le soir (comme autrefois en France, avant que tout se décale et que n’apparaisse le petit déjeuner).
Drache
(Nord et Belgique) La drache, c’est la pluie et quand «il drache», il pleut.
Ducasse
(Nord) «Viens, on va faire el’ducasse», c’est du chti, ça veut dire «viens, on va faire la fête». A l’origine, la ducasse, c’est la fête du village.
Cabines de bain à Dunkerque. (Photo Pascal Rossignol. Reuters)
Entre midi
(Moselle) «Tu rentres chez toi pour manger, entre midi ?» (comprendre «entre midi et deux» ou plus généralement «à la pause de midi»).
France de l’intérieur
(Alsace) Pour les vieux Alsaciens, le reste de la France c’est «la France de l’intérieur».
«J’étais jamais»
(Alsace) Si vous demandez à un Alsacien «t’es déjà allé à Marseille ?», il répondra «non, j’étais jamais.» Ça signifie qu’il n’a jamais mis les pieds sur la Canebière, mais ne lui faites pas remarquer cette erreur de temps de conjugaison, il ne voit pas la différence !
«Je t’appelle et je te dis quoi»
(Nord) Très pratique dans la vie de tous les jours. Remplace le (trop) long «je t’appelle et je te dis ce qu’il en est.»
Meilleur temps de
(Est) En Franche-Comté, on utilise l’expression «t’as meilleur temps de», pour dire «il vaut mieux pour toi, c’est préférable». Par exemple : «T’as meilleur temps de passer par la nationale 57, les autres routes sont embouteillées.»
Mouver
(Normandie) Les Normands ne touillent pas la salade, ils la mouvent. Avec une mouvette, qui est donc une cuillère en bois.
Oui
(Est) Dans l’Est en général, il est important de savoir qu’on ne dit pas «oui» mais «ui». On boit ainsi du «uiski», on va manger au «kuik» et on «tuitte» en 140 signes…
Choucroute (Photo Mal Langsdon. Reuters)
Petit pain

Equivalent alsacien de la chocolatine.
Quetsche
(Moselle) «Espèce de quetsche» : ceci est une insulte, à traduire par «bêta», «idiot», mais ce n’est pas méchant, plutôt affectueux.
Quitter
(Normandie) Si votre love affair normande vous dit «je te quitte» à la fin d’une conversation, no panic : ça veut dire «je te laisse». D’ailleurs, même sa veste, on la quitte…
Rebond
(Nord) Le lendemain d’un mariage, quand on refait la fête, c’est «un rebond».
Rien
(Haute-Normandie) Vous présentez fièrement votre nouveau-né à la branche cauchoise de la famille, qui s’exclame : «Il est rien beau le Léo!» ou «Qu’il est gentil le bézot !». Ne le prenez pas mal : «rien» veut dire «très» dans ces contrées humides, «gentil» signifie «mignon», le «bézot», c’est le petit dernier. Et souvent, on met l’article devant les prénoms : «Allez viens, la Marie, on va chercher le Sylvain !».
Sachet
(Alsace) Comme un cornet (cf plus haut).
Savoir
(Belgique) «Je sais plus me lever, j’ai trop mangé» : «je ne peux pas me lever», en Belgique, et dans le Nord parfois, le verbe «savoir» est souvent employé pour «pouvoir».
A ce sujet, si un enfant belge veut inviter un copain à la maison, ses parents lui demanderont sans doute : «Est-ce qu’il sait de sa mère ?» au sens de : «Est-ce qu’il a l’autorisation de sa mère ?». Par exemple : «Il veut manger une boule [un bonbon], mais est-ce qu’il sait de sa mère ?»
Schlopp ou schloppa
(Est) Les schlopp sont des pantoufles, et particulièrement celles qui font «chlop chlop» quand on marche.
Schlouk
(Alsace) Boire un schlouk : une gorgée. Un petit schlouk est un schoutz, comme, dans «pour une bonne vinaigrette, je mets un schoutz de Melfor et un schlouk d’huile».
Septante
(Belgique) En Belgique, comme chacun sait, on dit «septante» et «nonante». Mais curieusement, on ne dit pas huitante ou octante comme en Suisse : on dit quatre-vingts, comme en France.
Service
(Alsace) «Service !» Répondu par un commerçant à qui on dit merci. C’est une sorte de «y a pas de quoi» professionnel : c’est mon métier, je vous rends service ! Adopté aussi chez les particuliers, du coup, à la place de «de rien».
S’il vous plaît
(Nord, Belgique) Pour dire merci. Quand on vous rend la monnaie à la caisse. Genre, vous êtes dans un bar, en terrasse, le serveur vous rend la monnaie concluant d’un très poli «s’il vous plaît» qui, sur le moment, peut laisser circonspect. Vous ne devez plus d’argent, tout va bien.
Spitter
(Belgique) «Ça spitte !» : ça éclabousse. On entend beaucoup le mot dans les pissotières des écoles belges. Il y a une blague à ce sujet : deux garçons font pipi l’un à côté de l’autre dans une pissotière. L’un se frotte l’œil. L’autre : «Conjonctivite ?» Le premier : «Non, ça spitte !»
Spritzer
(Est) Spritzer, à prononcer «chpritser», c’est envoyer du jus. Mais non, c’est pas crado, ça s’applique surtout pour un citron, un brumisateur ou tout autre diffuseur qui fait pschitt. Exemple : «Je déteste croquer dans une tomate crue, ça spritze tout le temps !»
Soleil à Strasbourg. (Photo Vincent Kessler. Reuters)
Tantôt
(Nord, Normandie, Belgique) Accrochez-vous. Si quelqu’un vous quitte en lançant un «à tantôt !», c’est que vous devez vous revoir dans la journée. Fastoche. Pourtant «j’irai tantôt» signifie clairement «j’irai cet après-midi». Un petit effort encore : si vous croisez votre belle-mère au marché le matin, le soir, vous direz à votre femme : «Tiens, j’ai vu ta mère tantôt.» Pour résumer, tantôt veut dire «un peu avant», «un peu après», «tout à l’heure» ou «après-midi». Tantôt l’un, tantôt l’autre, c’est le contexte qui donne la clé. A demain tantôt !
«Tirer son plan»
(Belgique) Ça signifie «se débrouiller». On dit «tire ton plan» à quelqu’un qui vous demande de l’aide et qu’on envoie paître.
Tsé
(Belgique) Beaucoup de phrases se terminent par «tsé» (tu sais) : «Je me suis cassé le poignet, j’ai difficile à écrire, tsé». C’est l’équivalent du «you know» anglais.
Une fois
(Belgique) «Viens une fois ici» pour «Viens un peu ici».
Venir avec
(Est) Pour dire «accompagner», on dit plutôt «venir avec», calqué sur l’allemand «mitkommen». Exemple : «Tu viens avec ?» qui se dit aussi en Alsace. Expression qu’on entend aussi très souvent en Belgique.
Vingt
(Lorraine, Nord, Belgique) Si vous êtes amené à prononcer ce nombre dans une situation ou une autre, n’oubliez pas qu’on prononce le t de la fin. Elémentaire.
Wassingue
(Nord) «Je vais passer la wassingue» : dans le Nord, ça signifie qu’on va passer la serpillière. Dans l’Ouest, on dit une «since». En Belgique, on dit «une loque». Et en Normandie, on passe la «toile» ou la «vadrouille».
Yo, Hopla, Oyé
(Lorraine, Alsace) Et bien sûr le trio infernal d’interjections à utiliser à toutes les sauces :
– «Yo» (plus souvent yooo, d’ailleurs), qui peut vouloir tout dire, selon l’intonation. On peut s’en servir pour acquiescer, montrer la surprise, ou le soupirer d’un ton blasé…
– «Hopla !» Ça sert de bonjour, de au revoir, de salut, et aussi de «allez zou», «c’est parti».
– «Oyé», pareil que yo, on le fait traîner : «oyééééé…», parfois sur le ton de la lamentation. Genre «oyééé, il fait trop chaud pour travailler»… Ou alors, en réponse à quelque chose qui nous paraît incongru ou exagéré : «Quoi ? 20 euros la bouteille de Schnaps ? Oyééé…»
Photos Reuters
© Libé 2022
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